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mène résolument ses troupes au combat et leur promet de brillantes victoires ? C’est de l’opposition que dépend essentiellement ce résultat. S’il arrivait que ses propositions fussent excessives et ses attaques violentes, si la majorité se sentait vivement menacée dans ses plus chers intérêts, dans ses opinions fondamentales, elle pourrait alors se rallier au cabinet, elle pourrait se rallier sans réserve, et dans ses paroxismes de zèle et de crainte, les yeux fixés sur l’intérieur, elle pourrait finir par tout accepter ou tout excuser.

Évidemment il est de l’intérêt du ministère que la chambre et le pays se coupent en deux, sans intermédiaires, sans nuances, dût-il, dans ce schisme, perdre quelques amis incertains aujourd’hui et flottans. À tort ou à raison, le ministère craint peu que la gauche ne prenne le pouvoir d’assaut ; il ne paraît le craindre ni dans les chambres, ni dans les colléges électoraux. Toutes les fois que la question est posée nettement entre la gauche et la droite, et que les nuances se trouvent absorbées par les deux couleurs dominantes, le cabinet se flatte de pouvoir compter sur la majorité. Le danger, à ses yeux, est ailleurs, il est tout dans les situations intermédiaires ; il ne craint pas les hommes qui veulent monter au pouvoir par la brèche, mais les hommes qui, sans être ministériels, ne sont pas séparés du pouvoir par des abîmes. Bref, c’est le ministère qui est intéressé à ce que la lutte parlementaire devienne de jour en jour plus vive, plus ardente, à ce qu’une sorte de point d’honneur interdise toute opinion mitigée, toute restriction, toute réserve. L’opposition servira-t-elle les intérêts du cabinet ? Nous ne tarderons pas à l’apprendre.

Les bureaux de la chambre viennent d’autoriser la lecture des propositions sur la réforme électorale et sur les incompatibilités. On dit que personne ne s’y est opposé. Évidemment les partis se sont donné rendez-vous sur ce terrain. Le débat sur la prise en considération des deux propositions, en particulier de celle sur la réforme, sera la grande bataille, le combat décisif de la session.

Les nouvelles d’Afrique sont de plus en plus favorables. Un grand nombre de tribus se rallient franchement à notre domination. Espérons que le gouvernement saura profiter de ses succès. La commission chargée d’approfondir la question de la colonisation africaine s’est réunie sous la présidence de M. le duc Decazes. C’est avec une juste impatience que le pays attend les résultats nets et positifs de son travail.


— Chaque année voit augmenter le nombre des cours du collége de France : à la fondation d’une chaire de littérature slave a succédé celle de deux cours, consacrés l’un à la littérature méridionale, l’autre à la littérature du Nord. Après avoir songé à la Pologne et à la Russie, n’était-il pas juste de se rappeler aussi l’Espagne et l’Italie, l’Allemagne et l’Angleterre ? M. Philarète