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au bout de dix-huit ans, non par suite d’un plan conçu d’avance et de délibérations communes, mais en quelque sorte par la seule force des choses, et les Allemands la regardent avec raison comme un des faits les plus considérables de leur histoire politique. Nous allons essayer d’expliquer de quelle manière a été préparée la solution de cette grande question, et comment la Prusse a été amenée à y prendre la principale part.

Nous avons vu que le congrès de Vienne n’avait rien décidé sur les relations commerciales entre les divers états de la confédération germanique, en sorte que chaque gouvernement eut à se faire à cet égard une législation suivant ses besoins et ses intérêts particuliers. Or, il n’y en avait aucun dont la situation présentât plus de complications que celle de la Prusse. Les notables accroissemens qu’avait reçus cette monarchie, et le rôle qu’elle avait joué dans les derniers évènemens l’avaient élevée au rang de grande puissance européenne ; mais il lui fallait, pour s’y maintenir, des finances prospères, une armée considérable, une administration une et forte, et il suffit de jeter les yeux sur une carte pour comprendre combien tout cela était difficile à obtenir avec la configuration géographique que les traités lui avaient faite. Son territoire formait comme un long ruban d’une largeur très variable, lequel partait des frontières de la Russie pour aboutir à celles de la France et de la Hollande ; coupé tout-à-fait par le milieu, il se divisait en deux masses principales où se trouvaient enclavées quelques petites principautés indépendantes, tandis que lui-même avait de son côté plusieurs enclaves isolées au milieu des états voisins. Rien n’était plus différent que les productions, les intérêts, les mœurs des diverses provinces, dont quelques-unes, récemment ajoutées à la monarchie, présentaient à l’administration ces difficultés particulières qui résultent toujours d’un changement total des relations antérieures. Les circonstances ne permettant pas d’augmenter notablement l’impôt territorial, l’état devait chercher ses principales ressources dans l’impôt indirect. Mais sur quelles bases fallait-il l’asseoir ? quelle législation financière et commerciale fallait-il adopter ? c’était une question fort embarrassante à résoudre. Tout était à créer sous ce rapport, et on ne pouvait laisser les choses dans l’état où elles se trouvaient sans compromettre la prospérité de la monarchie, et sans renoncer en quelque façon à l’espoir d’y établir un jour l’unité politique et administrative. En effet, l’ancienne Prusse était soumise, depuis le temps du grand Frédéric, à un système de régie fort sévère et fort compliqué : il y existait une foule de douanes par-