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ÉTUDES SUR L’ALLEMAGNE.

mis au système continental. Les barrières élevées par le conquérant français étant tombées, l’Angleterre, encombrée de produits industriels, en inonda le continent, et l’Allemagne devint un de ses principaux marchés. À l’invasion des armées françaises, dit un écrivain, succéda celle des marchandises anglaises. La France, dont l’industrie n’aurait pu résister à cette redoutable concurrence, la protégea en renforçant son système prohibitif. Quant à l’Allemagne, sa constitution nouvelle ne lui fournissait aucun moyen de défense ; car l’acte fédéral n’avait rien réglé sur les rapports commerciaux des états de la confédération, soit entre eux, soit vis-à-vis de l’étranger, et l’on n’avait pas cru possible de prendre à cet égard des mesures uniformes. Les pays allemands, unis par un lieu politique, restèrent dans un état d’isolement ou même d’hostilité, quant à leur commerce et à leur industrie. Chacun garda ses lignes de douanes, ses tarifs, ses prohibitions, plus souvent dirigés contre le voisin allemand que contre l’étranger, et la rivalité des intérêts particuliers fit tout-à-fait perdre de vue l’intérêt général. Cette rivalité fut cause que, tandis que les marchandises étrangères trouvaient un débouché facile sur le territoire de la confédération, la France, la Hollande, l’Angleterre, n’ayant pas de représailles à craindre, se fermèrent aux produits du sol et de l’industrie allemande, lesquels, ne trouvant que des barrières à l’extérieur et à l’intérieur, furent réduits à des marchés locaux fort restreints. Il est facile de comprendre combien une pareille situation devait gêner le développement de la richesse générale. L’industrie surtout, grevée et entravée de toutes manières, soit dans l’achat des matières premières, soit dans le débit des objets fabriqués, se vit hors d’état de résister à la concurrence anglaise, et se sentit menacée dans son existence. Les pays manufacturiers se plaignirent hautement. On réclama la liberté du commerce entre les états de la confédération, et on en appela sur ce point aux promesses un peu vagues du traité de Vienne ; mais ces promesses, personne ne pensait sérieusement à les mettre à exécution, et, tout en reconnaissant les inconvéniens de l’état de choses existant, on le regardait comme un mal sans remède. Quelque nécessaire que fût une union commerciale pour faire sentir aux peuples allemands leur unité nationale, la constitution de l’autorité fédérale n’offrait aucun moyen de l’imposer à des gouvernemens fort jaloux de leur indépendance, et une semblable mesure ne pouvait résulter que d’une transaction à laquelle s’opposaient trop d’intérêts privés, trop de préjugés, trop d’habitudes, pour qu’on pût la juger possible. Elle a pourtant eu lieu