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Mehadia, à la frontière valaque ; l’Albanie, la Bosnie, la Macédoine, en ont d’excellentes ; la source sulfurée de Bania (les bains) sur la Moravitsa, en Bulgarie, attire déjà les Anglais, et celle de Toplitsa, près de Nich, en Serbie, pourra un jour le disputer à Tœplitz. Il y a des marais salans à Navak, sur le golfe de Saros (mer Égée), et à Achioli, sur la mer Noire ; il y en a aussi en Albanie, à Bastova, près d’Aulone, à Paliouri, près d’Arta. En Bosnie, à Touzla, il y a deux sources salées. Toutefois on ne tire de ces diverses salines qu’une quantité de sel insuffisante pour le pays, et l’on peut dire que ces nombreuses provinces dépendent entièrement, sous ce rapport, de la Valachie, qui est, de toute l’Europe, la contrée la plus riche en sel fossile ; celui de la petite Valachie est du sel de roche, qui se taille comme de la pierre et se colporte en gros cubes.

IV.

Si des productions naturelles l’attention se porte sur l’industrie, on voit la plus extrême indigence succéder à une exubérante richesse. À peine trouve-t-on des vestiges de cet ancien luxe byzantin et mauresque qui faisait l’admiration des croisés. L’industrie est pratiquée à l’antique : comme il y a des tribus de pasteurs, de moissonneurs, de même il y a des tribus de maçons, de bijoutiers, de fontainiers, de faiseurs de tapis. La bijouterie en filigrane est surtout exercée par les Tsintsars du Pinde ; ce sont les Génevois de l’empire. Nos pendules sont encore chose inconnue : on se sert de clepsydres, horloges de sable, comme au temps d’Alexandre. Il y en a à Constantinople dans tous les corps-de-garde. En revanche, le plus pauvre musulman a sur lui une montre, nécessaire pour lui indiquer l’heure précise des cinq prières du jour. Les beaux tapis turcs, à dessins si riches et si variés, ne se fabriquent en Europe qu’à Jarkoe et à Berkovtsa, en Bulgarie. À Jarkoe, toute la population n’est occupée que de cette industrie ; on y voit les jeunes filles en longues rangées, accroupies devant leurs métiers, sous les hangars et les portiques extérieurs de leurs cabanes ; elles travaillent du matin au soir et ne gagnent que cinq francs par mois ; encore leur salaire a-t-il été élevé au-dessus du taux ancien. Les broderies dont les vêtemens des Gréco-Slaves sont ordinairement couverts, se font partout dans l’intérieur des familles ; mais les brodeuses reconnues dans tout l’Orient comme les plus habiles sont les Grecques. Quoique les armes se fabri-