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et se rencontrent, pour ainsi dire, à chaque pas qu’elles font. Aussi trouve-t-on dans toute la Grèce des Slaves disséminés comme agriculteurs et pasteurs, et des Grecs dirigent l’industrie et le commerce dans presque toutes les provinces slaves.

Il est remarquable que chacun des principaux groupes de montagnes gréco-slaves a de tout temps garanti une nationalité, et servi d’asile à des vaincus. Tel est pour les Grecs le mont Olympe (vulgairement Lacha), qui, haut de 6,000 pieds, n’est accessible que par des sentiers suspendus sur des abîmes, au fond desquels écument les torrens, ou croupissent les lacs formés par la mer. Grace aux précipices qui l’entourent, ce refuge de la nationalité grecque deviendrait inexpugnable, s’il était défendu seulement par quelques centaines de palikares. Cette montagne est terminée, du côté de la Macédoine, par un mur à pic, haut de 3,000 pieds, qui surmonte l’horrible gorge de Platamona ; du côté opposé, elle abrite la vallée de Tempé aux ombrages toujours délicieux, et protége la Thessalie. Cette longue province, que le Penée féconde, forme une espèce de cirque ; sur les degrés intérieurs de cette vaste arène étaient assises soixante-quinze villes florissantes. Les Turcs n’ont jamais complètement subjugué les Thessaliens ; les habitans d’Ambelakia et des villages de l’Ossa, organisés au XVIIIe siècle en républiques fédérées, et rivalisant par leur commerce avec plus d’une grande ville manufacturière d’Europe, ne laissaient aucun Ottoman approcher de leur vallée. Divisés entre douze capitaines ou chefs de bandes, les fertiles plateaux de l’Olympe ont presque toujours été libres. Les annales jusqu’ici ignorées de cette montagne mentionnent des dynasties de héros et nous montrent ces vaillans capitaines traitant comme souverains avec les Turcs, qui ont cent fois, par des diplômes solennels, reconnu leurs droits à l’indépendance.

L’Olympe thessalien communique avec l’Athos par la mer et par les chaînes de la haute Macédoine ; là est le centre militaire de la péninsule ; cette position domine et les Grecs et les Slaves. Qui possédera ces sommets y trouvera toujours l’indépendance, et pourra souvent menacer celle des autres. De ce point, en quelque sorte monarchique, berceau de Philippe et d’Alexandre, se détache et s’isole le mont sacré du peuple, Monte-Santo ou l’Athos, masse calcaire haute de 6,300 pieds, qui termine la Macédoine du côté de la mer, comme l’Olympe la limite sur le continent. Les vingt-deux couvens de l’Athos forment une espèce de république, composée d’à peu près six mille moines : ce petit état, ayant son sénat et ses ministres,