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FRANÇOUNETTO.

tans confondus. Aussitôt la veillée se disperse, la fatale nouvelle se répand dans le pays ; les filles et les mères, jalouses de la belle des belles, empoisonnent encore les paroles du sorcier, et la malheureuse devient aussi délaissée, aussi à plaindre, qu’elle a été brillante et recherchée. Cette catastrophe met fin au second chant.

On voit que, jusqu’à présent, le petit roman inventé par Jasmin n’a pas mal marché. Les deux derniers chants ne sont pas moins bien conçus. Françounette, au désespoir, essaie plusieurs moyens de prouver qu’elle n’appartient pas au démon ; rien ne lui réussit. Le jour de Pâques, elle va dévotement entendre la messe, mais au moment où elle veut prendre du pain bénit, le marguillier, qui est oncle de Marcel et qui porte la corbeille, passe devant elle sans s’arrêter. Cet affront est près de la faire mourir de honte, quand Pascal se précipite et lui donne le plus beau morceau du pain sacré. Une autre fois, elle va faire une dévotion à une statue de la Vierge fort révérée dans le pays ; au moment où le prêtre approche de ses lèvres l’image de la mère de Dieu, un coup de tonnerre éclate, un vent subit éteint le cierge de la pauvre fille et les cierges de l’autel. Ce coup de tonnerre est suivi d’un orage affreux qui dévaste tout le pays ; alors la population entière, soulevée par la douleur et la superstition, s’ameute pour brûler la cabane où Françounette vit seule avec sa vieille grand’mère.

Aux cris de la foule furieuse, Pascal et Marcel accourent tous deux. — Il n’y a qu’un moyen de la sauver, dit le soldat, c’est de l’épouser, et je l’épouse si elle veut. Moi aussi, s’écrie Pascal, oubliant dans ce moment suprême la terrible fatalité qui condamne à mort le mari de la fiancée du démon. Françounette hésite à accepter ce sacrifice, mais quelque chose lui dit que la menace du vieux sorcier est vaine, et elle consent à épouser Pascal. La fureur populaire s’apaise. Le jour de la noce arrive bientôt ; tout le pays y assiste dans une tristesse profonde ; chacun plaint le sort de ce brave jeune homme qui va périr victime de son amour. Au moment où les deux époux sont sur le point d’entrer dans la chambre nuptiale, la mère de Pascal accourt en pleurant ; elle se jette aux pieds de son fils, et le supplie de ne pas la laisser seule sur la terre. Enfin, touché du désespoir de la malheureuse mère, Marcel avoue que c’est lui qui a payé le sorcier du bois noir pour faire son abominable histoire, et le malheur des deux amans se change en ivresse.

Le quatrième et dernier chant est le plus faible comme poésie, mais il est en revanche le plus dramatique. Le soulèvement de la populace