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l’avoir dévoilée. On sait maintenant que les complices de cette déloyale conspiration l’avouent, et qu’ils en tirent vanité. N’a-t-on pas lu ces invectives de lord Palmerston confessant, à la dernière heure, que le traité de juillet avait été dirigé contre la France, et calculé, comme il le dit audacieusement, pour déjouer nos secrets desseins ?

Oui, cela est démontré aujourd’hui, en dépit des clameurs mensongères qui ont retenti dans le parlement anglais, la France n’a trompé ni attaqué personne ; elle s’est à peine défendue, et sa bonne foi, autant que la faiblesse de son gouvernement, l’a livrée. Quant aux alliés, les uns, et ce sont les moins coupables, n’ont voulu que séparer la France de l’Angleterre, et rompre une alliance qui servait trop efficacement à leur gré la cause de la civilisation ; les autres, et je parle des ministres anglais, se proposaient à la fois d’humilier la France et d’affaiblir l’Égypte : ils avaient tout ensemble une vengeance personnelle à poursuivre et les intérêts d’une ambition exclusive à faire prévaloir. Le cabinet britannique a tout l’odieux du traité de Londres ; reste à savoir s’il recueillera le bénéfice qu’il s’en était promis.

La France et la coalition ont abordé les évènemens avec des espérances qui devaient être également déçues ; le gouvernement français supposait que les forces de Méhémet-Ali, à peu près irrésistibles pour une armée turque, suffiraient pour défendre la Syrie contre une agression tentée au nom de l’Europe et avec des soldats européens ; en cela, il s’est évidemment trompé. Le seul aspect des drapeaux anglais a mis en fuite les vétérans d’Ibrahim. Le gouvernement britannique, de son côté, avait imaginé que l’ordre était possible en Syrie, indépendamment de la police sévère qu’y maintenait l’armée égyptienne ; en rétablissant dans cette province l’autorité directe du sultan, il prétendait y faire régner la paix et une sorte de liberté. Ce qu’il a restauré, c’est la licence, c’est la guerre civile avec tous ses excès. La France en avait averti lord Palmerston, et elle a eu raison sur ce point.

Les puissances européennes ont essayé de faire contre nous, par la seule influence de leur concert, ce qu’elles avaient fait en 1814 et en 1815 par l’union de leurs forces militaires. Elles ont voulu prouver au monde que l’association des quatre cours, pour peu qu’elle prît une forme agressive, pouvait à tout moment paralyser notre action. Je le dis à regret, cette tentative leur a complètement réussi. Elles nous ont successivement tenus en échec, et amenés à composition. Nous leur avons donné le droit de répéter, après lord