Page:Revue des Deux Mondes - 1841 - tome 28.djvu/879

Cette page a été validée par deux contributeurs.
875
REVUE. — CHRONIQUE.

nommer aux places vacantes du conseil d’état. Il y a un mois que nous le félicitions de deux nominations que le bruit public donnait comme certaines. Aujourd’hui on répand des bruits d’une tout autre nature. Nous ne les répéterons pas parce que nous n’avons pas de goût pour ces misères.

Quant aux personnes, la question est toujours de savoir quelle sera dans la chambre l’attitude de MM. Dufaure et Passy. Au fait, leur entrée au ministère paraît impossible. Ils ne voudraient pas y entrer d’une manière quelque peu subalterne, comme une appendice. Ils ne peuvent y entrer pour y jouer un rôle principal sans briser le cabinet. C’est une alliance qui, loin d’être intime, serait pleine d’embarras et de soupçons : elle inquiéterait les uns et rapetisserait les autres. Tout considéré, elle ne convient à personne. Il faut que le ministère se décide à affronter la session tel qu’il est, car il ne peut pas compter sur l’accession de MM. Passy et Dufaure.

Depuis quelque temps, la presse est muette sur les projets que le ministère se propose de présenter aux chambres. Espérons que ce silence nous ménage d’agréables surprises. Il est des questions d’une haute gravité qu’il est urgent de résoudre. Les coalitions d’ouvriers se renouvellent, et, comme on l’a fait remarquer avec raison, à des époques pour ainsi dire périodiques, avec un caractère réfléchi, et lorsque la fabrication est le plus active. Évidemment les ouvriers agissent sous l’empire de fausses notions, d’erreurs qu’il importe de dissiper. Nous ne cesserons de revenir sur ce point capital, l’instruction des classes laborieuses. Il s’agit du maintien de la paix publique, de l’avenir de notre société. Le gouvernement ne peut pas tout faire ; il a besoin que tous les hommes influens, riches, éclairés le secondent ; en attendant, il peut beaucoup par lui-même. Les chambres d’ailleurs ne lui refuseront pas leur puissant appui ; les hommes de tous les partis, de toutes les opinions, sont heureusement unanimes sur ce point, qu’il faut travailler puissamment à l’éducation des classes laborieuses. Ces jours derniers encore la presse en a donné une preuve éclatante, et que nous aimons à rappeler.

L’insuffisance des ressources prévues par la loi de 1833 n’avait pas permis l’établissement spécial et distinct d’une école primaire supérieure dans un grand nombre de villes dont la population excède six mille ames. Pour combler cette déplorable lacune, M. Villemain a imaginé un heureux expédient, qui est d’annexer des cours d’instruction primaire supérieure aux colléges communaux. L’utilité de la mesure saute aux yeux. Elle rend l’exécution de la loi de 1833 moins coûteuse, plus facile. Il y a économie pour les locaux, économie pour le traitement des maîtres. Les familles trouvent dans le même établissement l’enseignement classique, et « un enseignement usuel sans être illettré, pratique sans être trop restreint, et qui prépare utilement aux professions industrielles et commerçantes, si nécessaires et si répandues dans notre état social. » (Rapport de M. Villemain au roi).

Nous ajouterons que, dans notre état social, il est d’une sage politique que les enfans destinés aux diverses carrières trouvent l’instruction dans le même local, sous l’œil des mêmes chefs, dans un établissement portant pour tous