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qu’importait l’Orient à la Russie et à l’Autriche, quand lord Palmerston faisait briller à leurs yeux l’espoir de nous arracher l’Occident ? Cette perspective leur ayant été ouverte par la dépêche que lord Palmerston écrivait le 28 juin, et qui disait clairement à quelles conditions l’Angleterre changerait d’alliances, il reste à examiner ce que l’Autriche et la Russie ont fait pour aller au-devant.

Dès le premier moment, l’Autriche et la Russie se disputèrent la faveur de l’Angleterre, mais la Russie négociait comme un cabinet qui a l’habitude du commandement ; l’Autriche apportait jusque dans ses prétentions la souplesse d’une cour accoutumée à ramper et à obéir. Elle se posait en intermédiaire, elle voulait être le nœud de la coalition. L’Angleterre et la Russie, au contraire, montraient, chacune de son côté, la volonté de traiter directement. Quand l’Autriche, après avoir refusé d’envoyer dix mille hommes en Syrie, demandait (dépêche du 1er juillet 1839) la coopération d’une flotte russe dans la Méditerranée, et l’occupation de Constantinople par une armée russe, lord Palmerston répondait par un refus. Mais il accordait le tout, sans marchander, dès que la Russie en exprimait elle-même le vœu par l’organe de M. de Brunnow ; et quant à la Russie, après avoir fait échouer la conférence de Vienne, elle portait à Londres les mêmes propositions que l’Autriche avait d’abord présentées. En un mot, la coalition avait commencé par pivoter sur l’Autriche ; on verra bientôt la Russie en devenir le point d’appui.

L’ardeur avec laquelle M. de Metternich seconda les projets de lord Palmerston se révèle par la lecture du plan qu’il avait inventé à la réception de la dépêche anglaise, et qui est déjà, une année à l’avance, le traité de juillet. Ce plan se trouve décrit dans une dépêche de lord Beauvale à lord Palmerston, à la date du 11 juillet 1839.

« Quant au plan de pacification, le prince Metternich adopte pleinement les idées de votre seigneurie. Mais la Porte ayant indiqué elle-même les termes auxquels elle veut conférer l’Égypte à la famille de Méhémet-Ali, il considère ces termes, qui consistent dans la restitution de la Syrie et de Candie, et dans le désarmement, comme un sine quâ non. La restitution de la côte orientale de la mer Rouge, et les conditions auxquelles l’Égypte doit être tenue en fief, sont ouvertes à la négociation. »

Voilà bien les bases du traité de Londres. Quant aux procédés que M. de Metternich conseillait pour l’exécution, l’on va voir qu’il ne s’éloignait pas beaucoup de ce qui a été fait.

« La négociation doit commencer à Constantinople, et sera complète lorsque la Porte sera tombée d’accord, avec les cinq puissances, des termes qu’il con-