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tions échangées entre le maréchal Soult et lord Palmerston, à l’avénement du 12 mai. Le 30 mai, dans la fameuse dépêche adressée à M. de Bourqueney, le maréchal insinuait qu’en accordant au fils de Méhémet-Ali l’hérédité du gouvernement de l’Égypte, on calmerait l’agitation du vice-roi. L’Angleterre ne répondit pas immédiatement à cette ouverture. Quinze jours après, le 14 juin, lord Granville déclarait au maréchal qu’il n’avait point d’instructions de son gouvernement, mais qu’il ne doutait pas, d’après les lettres particulières qu’il avait reçues de lord Palmerston, que le cabinet cédât pour sa part l’hérédité de l’Égypte à Méhémet-Ali, à condition que les troupes égyptiennes évacueraient immédiatement la Syrie. En même temps, lord Granville, par un subterfuge dont la pensée appartenait sans doute à son gouvernement, présentait cette combinaison comme ayant déjà été mise en avant par la France et par l’Autriche.

Il est vrai que l’internonce autrichien, M. de Stürmer, avait fait, en son propre nom, à la Porte, des ouvertures qui indiquaient la rétrocession de la Syrie comme la base de l’arrangement à intervenir entre le sultan et le vice-roi ; mais le cabinet autrichien admettait lui-même la convenance de laisser la Syrie sous la domination égyptienne jusqu’à la mort de Méhémet-Ali.

« Les points sur lesquels M. de Metternich voudrait connaître l’opinion des cabinets, sont les suivans :

« 1o Faut-il garantir l’Égypte à la famille de Méhémet-Ali, et cela doit-il se faire par des investitures successives ou par l’établissement d’un droit héréditaire, en réservant toujours à la Porte sa suzeraineté ?

« 2o La restitution de la Syrie doit-elle avoir lieu immédiatement ou à la mort de Méhémet-Ali ? Sur ce point, bien que le prince Metternich juge utile au pacha lui-même que la restitution soit immédiate, il reconnaît pourtant qu’il n’y aurait pas d’espoir d’obtenir cette rétrocession du pacha.

« Si le plan de restituer la Syrie à la Porte après la mort de Méhémet-Ali était celui auquel on devait définitivement s’arrêter, on doit s’attendre à voir la Porte demander la garantie des cinq puissances, et il faut préparer la réponse qu’on lui fera. » (Dépêche de lord Beauvale, Vienne, 14 juin 1839.)

À cette époque, la Russie[1] et la Prusse[2] s’étaient déclarées pour le statu quo, même dans l’avenir. Plus tard[3], la Prusse admettait que l’on accordât à Méhémet-Ali, avec l’hérédité de l’Égypte,

  1. Dépêche de M. de Nesselrode à M. Pozzo di Borgo, Saint-Pétersbourg, 15 juin 1839.
  2. Dépêche de lord W. Russell à lord Palmerston, Berlin, 5 juin 1839.
  3. Dépêche de lord Granville, Paris, 2 juillet 1839.