Page:Revue des Deux Mondes - 1841 - tome 28.djvu/716

Cette page a été validée par deux contributeurs.
712
REVUE DES DEUX MONDES.

position de nos ennemis, sans la communiquer en même temps à votre majesté, et sans faire un seul intérêt de nos intérêts communs[1]. »

En même temps les ambassadeurs britanniques envoyèrent au prince d’Orange, par M. Sylvius, les conditions auxquelles les deux rois consentaient à la paix avec les États-Généraux, et le traité d’étroite union qu’ils venaient de conclure entre l’Angleterre et la France. Afin de lui ôter l’espérance qu’il pouvait fonder encore sur leur désaccord, ils lui écrivirent : « Votre altesse ne trouvera pas mauvais qu’ayant remarqué ce que les députés de MM. les États, envoyés aux deux rois, ont fait pour leur donner de la jalousie l’un contre l’autre, comme si leur intention était de trouver leur compte à part, nous lui envoyions aussi la copie de l’acte que nous venons de faire avec MM. les commissaires de sa majesté très chrétienne, par lequel les États verront ce qui en est, et les mesures qu’ils auront à garder à l’avenir dans leur désir de faire la paix[2]. » Ils le prièrent en même temps de leur renvoyer dans dix jours la réponse des États aux propositions des deux rois[3].

En recevant communication des demandes des deux rois, dont la sollicitude pour lui semblait même destinée à le compromettre vis-à-vis des États, le stathouder se montra fort indigné. Il se rendit sur-le-champ à La Haye, pour les faire connaître aux États-Généraux, qui partagèrent ses sentimens[4], et qui, le 21 juillet, à sept heures du soir, les rejetèrent en ces termes : « Ayant été délibéré sur les conditions de paix proposées par le seigneur roi de France et par le seigneur roi d’Angleterre, après avoir pris le très prudent avis de son altesse, il a été trouvé bon et arrêté de déclarer par les présentes que, bien que leurs hautes puissances fussent très aises de voir la paix rétablie entre lesdits seigneurs rois de France et de la Grande-Bretagne et cet état, néanmoins les conditions dont il vient d’être parlé sont si dures et si insupportables, que leurs hautes puissances ne se pourront jamais résoudre à les accepter, mais qu’elles se trouvent forcées de défendre cet état et ses habitans de tout leur pouvoir ; et d’attendre le succès qu’il plaira à Dieu

  1. Lettre de Louis XIV à Charles II, du camp de Boxtel, du 17 juillet 1672. (Corresp. d’Angl., vol. III.)
  2. Lettre du duc de Buckingham et du comte d’Arlington au prince d’Orange, du camp de Boxtel, le 17 juillet 1672. (Ibid.)
  3. Ibid.
  4. Samson, Histoire de Guillaume III, t. II, p. 311.