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taureaux, voyages à mulet, à cheval, en galère, repas dans les auberges, manières de boire et de cuisiner, il n’omet rien, sans pourtant s’appesantir hors de propos. Des couplets d’une bizarrerie charmante, des portraits, des anecdotes, des histoires militaires ou politiques, toujours vivement contées, font de ce livre une lecture des plus agréables et des plus instructives, dont l’intérêt est tout-à-fait de circonstance, maintenant que tous les yeux sont fixés sur la Péninsule, fermée encore pour long-temps à la curiosité du voyageur.


— Il vient d’être publié à Angers une réimpression de Joachim Du Bellay[1], qui fait honneur au goût de l’éditeur, M. Victor Pavie. Parmi nos vieux poètes, Du Bellay est un de ceux dont le renom légitime s’est le mieux soutenu. On n’a point oublié la notice développée que M. Sainte-Beuve lui a consacrée dans cette Revue. En terminant, M. Sainte-Beuve parlait de cette sympathie que Du Bellay a de tout temps rencontrée en France, au XVIIIe siècle même. Cette gloire durable et modeste du poète attire d’autant plus d’intérêt sur la réimpression que vient de publier M. Pavie. Il y a dans l’œuvre du poète angevin des parties d’une fraîcheur et d’une grace divines, que, malgré les prosaïques tendances de l’époque, bien des esprits sauront encore parmi nous comprendre et aimer. L’édition nouvelle témoigne d’ailleurs d’une conscience et d’un goût littéraires devenus trop rares dans notre librairie pour ne pas mériter d’être encouragés. Le choix des poésies à réimprimer a été fait avec un louable discernement, la vieille orthographe du poète a été respectée ; des notes intéressantes accompagnent le texte. On a joint aux poésies l’éloquent traité de Du Bellay, intitulé la Défense et illustration de la langue française. Enfin la notice de M. Sainte-Beuve a été placée en tête du volume, et c’était justice ; car l’éditeur avoue dans son avant-propos que cette notice a été la cause, et l’édition l’effet. Il ne manque donc rien à cette réimpression de Joachim Du Bellay pour appeler l’attention et mériter les suffrages de tous ceux qui s’intéressent encore sérieusement à l’histoire de notre langue et de notre poésie.


V. de Mars.
  1. Œuvres choisies de Joachim Du Bellay, avec un portrait d’après M. David. — Angers, chez M. Victor Pavie. — Paris, chez Techener, place du Louvre.