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ESPAGNE.

L’HORLOGE.
Vulnerant omnes, ultima necat..

La voiture fit halte à l’église d’Urrugne,
Nom rauque, dont le son à la rime répugne,
Mais qui n’en est pas moins un village charmant
Sur un sol montueux perché bizarrement :
C’est un bâtiment pauvre, en grosses pierres grises,
Sans archanges sculptés, sans nervures ni frises,
Qui n’a pour ornement que le fer de sa croix,
Une horloge rustique et son cadran de bois,
Dont les chiffres romains, épongés par la pluie,
Ont coulé sur le fond que nul pinceau n’essuie.
Mais sur l’humble cadran regardé par hasard,
Comme les mots de flamme au mur de Balthazar,
Comme l’inscription de la porte maudite,
En caractères noirs une phrase est écrite ;
Quatre mots solennels, quatre mots de latin,
Où tout homme en passant peut lire son destin :
« Chaque heure fait sa plaie, et la dernière achève. »
Oui, c’est bien vrai, la vie est un combat sans trêve,
Un combat inégal contre un lutteur caché,
Qui d’aucun de nos coups ne peut être touché,