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aux Druses des priviléges qu’ils avaient vainement réclamés de Méhémet-Ali, lord Palmerston espérait les confirmer dans la pensée de briser le joug égyptien. Cette politique sans scrupule obtint bientôt un commencement de succès. Une partie des montagnards se souleva. On peut juger des espérances que ce premier acte de la révolte dut exciter à Londres par l’extrait suivant d’une dépêche écrite le 10 juin 1840, par M. Moore, consul à Beyrouth.

« Je considère l’influence égyptienne comme touchant à sa fin en Syrie. Si l’on fournit aux insurgés des armes et des munitions, les troupes du pacha seront chassées du pays ou massacrées. »

Mais le résultat se faisant trop attendre au gré du gouvernement anglais, lord Ponsonby prit la résolution d’envoyer en Syrie son drogman, M. Wood, que l’on a vu déjà figurer dans les intrigues nouées en 1836 avec les chefs du Liban. La mission de M. Wood a été l’objet d’une controverse assez animée dans la chambre des communes. Dans la séance du 20 septembre 1841, le docteur Bowring accusait le gouvernement britannique d’avoir fomenté l’insurrection en Syrie et d’avoir employé à cette œuvre un agent anglais ; lord Palmerston répondit que M. Wood était un Anglais turcoman qui avait agi par les ordres du sultan et non par ceux du gouvernement anglais.

On ne saurait trop s’étonner et de la témérité de cette assertion et de la parfaite indifférence avec laquelle le parlement l’a reçue ; car enfin tout membre des communes avait sous sa main la preuve du contraire. Il ne s’agissait que d’ouvrir la correspondance diplomatique imprimée pour l’usage des chambres, et de lire les propres dépêches de lord Ponsonby ainsi que celles de lord Palmerston. Les adversaires de lord Palmerston auraient-ils craint d’afficher au grand jour dans sa personne une politique qui ne peut que déshonorer une grande nation ? Quoi qu’il en soit, voici les faits dans toute leur nudité.

Le premier prétexte dont on décora la mission de M. Wood, en 1840, fut la nécessité d’obtenir des renseignemens exacts sur l’état de la Syrie.

« J’ai cru de mon devoir, écrivait, le 29 juin 1840, lord Ponsonby, d’envoyer en Syrie M. Wood, mon drogman, qui a des relations personnelles avec la plupart des chefs du Liban. M. Wood est parti sur le Cyclope. »

Le départ de M. Wood pour la Syrie est antérieur, comme on