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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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31 octobre 1841.


La tentative des christinos a complètement échoué. Le parti modéré a manqué cette fois encore d’unité, de dévouement, d’énergie. Les généraux qui avaient pris la direction du mouvement cherchent leur salut dans l’exil, ou tombent sous le glaive des vainqueurs. Espartero voudra-t-il, pourra-t-il mettre un terme à ces dures réactions qui, loin d’étouffer les germes des discordes civiles, les fécondent et préparent au pays de nouvelles et sanglantes catastrophes ? Il est permis d’en douter.

Le parti exalté s’est vivement agité à la nouvelle de la tentative de Pampelune. Il a senti qu’il s’agissait pour lui d’être ou de n’être pas. Si les modérés fussent parvenus à enlever à Espartero la plus grande partie de l’armée, s’ils avaient ressaisi à la fois l’autorité civile et la puissance militaire du pays, il eût été difficile en effet, impossible peut-être aux exaltés de renouveler les scènes de la Granja et de Valence. Une minorité qui succombe a peu de chances de se relever. C’est l’audace qui, en lui donnant les apparences de la force, peut seule lui assurer la victoire. Le succès entretient ce prestige, une défaite le dissipe. Le jour où chaque parti ose également regarder en face et compter ses adversaires, le jour où tout homme comprend qu’il peut tenir tête à l’homme qui lui est opposé, ce jour-là la question n’est plus qu’une question de nombre, et la majorité triomphe ; c’est dire le parti de la modération et de la liberté régulière, parti qui en réalité, dans les discordes civiles, forme presque toujours la majorité. Ce jour n’est pas encore arrivé pour l’Espagne. Le parti modéré a fléchi devant l’audace des exaltés. Les vainqueurs, irrités par l’agression inattendue d’O’Donnell, par le souvenir du danger auquel ils viennent d’échapper, voudront profiter de la victoire pour franchir