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DES PARTIS EN FRANCE.

origine et le mandat qu’elle a reçu. Il y a trois ans, cette majorité a été élue expressément pour relever la dignité de la France et pour imprimer au gouvernement, dans ses rapports avec l’étranger, une marche plus ferme et plus hardie. Ira-t-elle solliciter le renouvellement de son mandat en laissant la dignité de la France plus compromise, la marche de son gouvernement plus vacillante et plus timide que par le passé ? Parmi ceux qui, en 1839, combattaient la coalition, beaucoup d’ailleurs, sans partager son avis sur les affaires intérieures, le partageaient sur les affaires extérieures, et convenaient, tout haut ou tout bas, que la France avait, en diverses occasions, trop fléchi et trop cédé. Approuvent-ils qu’elle fléchisse aujourd’hui et qu’elle cède encore davantage ? Qu’on y fasse bien attention, ce n’est point là, ce ne doit jamais être une question de parti. En Angleterre, il y a comme en France un parti conservateur ami passionné de l’ordre. Si dans la politique extérieure quelque chose distingue ce parti du parti contraire, c’est pourtant, ainsi que M. de Rémusat l’a fait si justement remarquer, un sentiment plus vif de l’honneur national et une susceptibilité plus jalouse. Il serait déplorable que dans le parti conservateur français un tel exemple ne trouvât pas d’imitateurs.

Je sais, au reste, qu’au point où en sont les choses, il n’est pas permis d’espérer qu’un cabinet, même résolu, même libre, même soutenu dans les chambres et hors des chambres, puisse subitement réparer le mal des derniers temps, et rendre à la France le rang qu’elle a perdu. Des fautes telles que celles qu’on a commises ont malheureusement de longues conséquences, et le pays, quoi qu’il arrive, souffrira plusieurs années encore des faiblesses qu’il a tolérées. Ce serait beaucoup pourtant qu’il y eût dès aujourd’hui dans cette politique descendante un temps d’arrêt bien marqué, et que les puissances étrangères ne pussent pas en douter. Ce serait beaucoup qu’il leur fût clairement, péremptoirement démontré que la coupe est pleine, et qu’une goutte de plus la fera déborder. Mais, il faut le répéter, ce résultat même, ce résultat négatif, est-ce à la politique qui en a produit un tout contraire qu’il est possible de le demander ? Malgré le déclin de notre puissance territoriale et l’abandon de notre puissance révolutionnaire, malgré la perte récemment consommée de nos dernières alliances, de nos dernières influences, l’Europe sait que la France, rajeunie par vingt-cinq ans de paix, contient en elle-même de grandes, de formidables ressources. C’est donc de notre volonté qu’elle doute plus que de notre force ; c’est sur notre amour immodéré de la paix qu’elle fait fonds plus que sur notre fai-