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DES PARTIS EN FRANCE.

reçu du vœu national sa dernière consécration, qu’au mépris de ce vœu le parti républicain conspira et s’insurgea pour la renverser. La monarchie constitutionnelle avait pour elle l’immense majorité du pays, qui, pour la conquérir, venait de courir les chances périlleuses d’une révolution. Le nom de république au contraire, lié à d’affreux souvenirs, n’excitait parmi les classes aisées que répugnance et terreur. Le parti républicain n’en tint compte, et, pour réaliser son utopie, ne craignit pas d’armer les citoyens les uns contre les autres et d’ensanglanter nos villes. Ce n’est pas tout. Précisément parce qu’il était minorité, et minorité très faible, le parti républicain ne pouvait se montrer difficile dans le choix de ses alliés. Il eut donc pour auxiliaires naturels, inévitables, d’une part cette lie de la société que le désordre appelle toujours à la surface, de l’autre les sectes antisociales, pour qui la réforme de l’ordre politique n’est que le prélude et l’avant-coureur de réformes plus profondes. De là, au sein même du parti républicain, chaque fois qu’il déposait les armes, des querelles ardentes et des haines implacables ; de là aussi l’effroi chaque jour croissant qu’il inspirait à toute la partie honnête et paisible du pays.

Aujourd’hui le parti républicain paraît reconnaître son tort. D’un côté, il affecte de se séparer ouvertement, avec éclat, des sectes désorganisatrices auxquelles trop long-temps il est resté associé ; de l’autre, il déclare que désormais il demandera à la discussion seule, à une discussion calme et grave, le triomphe de ses principes. Si le parti républicain persiste dans de tels projets, il pourra, par degrés, reprendre la place qu’il avait en 1830, et que ses violences lui ont enlevée ; mais il doit savoir qu’il n’entrera pas dans cette voie sans laisser derrière lui une bonne portion de son armée. S’il y a dans le parti républicain des convictions réfléchies et modérées, il y a aussi d’aveugles et coupables passions. Or, ces passions ne consentiront jamais à troquer le fusil pour la plume, et les chances d’une victoire profitable pour l’espoir d’un succès idéal et lointain.

Quoi qu’il en soit, il est clair que le parti républicain, comme le parti légitimiste, est à la veille d’une transformation, et qu’entre ses divers élémens le triage s’opère déjà. Le parti républicain, par ses propres forces et avec son drapeau, n’est plus d’ailleurs en mesure d’ébranler la société et de menacer le gouvernement. Quand on s’insurgeait il y a quelques années, c’était au nom de la république ; c’est aujourd’hui au nom de la communauté des biens, et le cri de guerre contre la richesse trouve un peu plus d’écho que le cri de