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le contre-amiral Lalande ; le 12 mai poussa les travaux avec quelque zèle ; le 1er mars les compléta avec une résolution qui lui fait honneur.

Deux officiers-généraux, MM. Lalande et Hugon, qui se sont succédés dans le commandement de cette flotte, ont apporté à son instruction les soins les plus attentifs, les plus assidus. Une émulation féconde a régné, grace à eux, dans toutes les parties du service, et, s’étendant jusqu’aux chefs, a produit les meilleurs effets. Dans la longue campagne d’Orient, les Anglais eux-mêmes ont pu reconnaître l’habileté de nos équipages dans les manœuvres de la voile et du canon. En croisant des rades de Métélin aux Dardanelles, du golfe d’Ourlac à Bezica-Bey, nos vaisseaux ont acquis, en temps de paix, une portion des qualités pratiques de la guerre. Secondé par d’excellens capitaines, M. Lalande a donc contribué à donner à la marine française l’impulsion heureuse qui l’anime aujourd’hui. M. Hugon n’a montré ni moins de persévérance ni moins d’activité. Sous l’empire de circonstances politiques plus ingrates, il a su entretenir dans la flotte cette vie et ce mouvement dont elle a besoin ; il l’a maintenue en haleine par de fréquentes sorties, par des évolutions en corps d’armée, par des appareillages et des mouillages renouvelés souvent. Pour rendre justice à cette suite d’efforts, il suffit d’avoir vu nos vaisseaux, leur brillante tenue, l’ordre qui y règne, la discipline des équipages et la merveilleuse intelligence qui préside aux exercices. Un vaisseau est un microcosme, un monde en miniature ; tout y a sa place rigoureusement assignée, et l’existence de ce bel ensemble tient surtout à la précision des détails. Chaque pièce de canon a ses servans ; chaque hune a ses gabiers. Ces longues batteries, à un moment donné, vont servir de dortoirs, et l’on verra de longues files de hamacs s’y balancer au gré de la vague. Mais qu’un signal se fasse entendre, à l’instant ces hommes sont debout, ces hamacs disparaissent, la batterie n’est plus qu’un champ de combat. Il en est ainsi de tout le reste. Chacun à bord a le sentiment de sa fonction ; la vie y est méthodiquement ordonnée ; les usages, les devoirs, les relations, y sont aussi formellement réglés que la distinction des logemens et des tables. La force de l’arme est dans cette organisation. À ce point de vue, la flotte ne laisse rien à désirer. Jamais le personnel de notre marine ne fit preuve de qualités plus réelles et n’eut, à un plus haut degré, cette valeur combinée qui naît de la qualité des hommes et de leur éducation acquise.

Peut-être le matériel offre-t-il un peu plus de prise à la critique. La flotte ne compte qu’un très petit nombre de vaisseaux neufs : le