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LE
DOCTEUR HERBEAU.

I.

En quelle année naquit le docteur Herbeau, Aristide Herbeau, docteur de la Faculté de médecine de Montpellier, membre du conseil municipal de Saint-Léonard, chevalier de la Légion d’Honneur, une des figures les plus poétiques qu’ait ensevelies l’ombre des temps modernes ? À quelle époque vint-il exercer la médecine à Saint-Léonard ? C’est ce que nul ne saurait dire. Il n’est personne qui se rappelle avoir assisté aux débuts du docteur Herbeau, personne qui se souvienne qu’un autre docteur ait existé à Saint-Léonard avant le docteur Herbeau. On l’a toujours connu avec la même perruque, le même ventre et le même jonc à pomme d’or ; il a toujours eu cinquante ans, le même cheval, la même femme, la même culotte de velours et les mêmes souliers à boucles d’argent. Son cheval, c’était une jument, avait nom Colette : horrible bête, d’un gris sale, mais d’un trot solide, qui boitait toujours en sortant de l’écurie, mais qui, au bout d’une heure, allait comme un petit vent. Mme Adélaïde Herbeau était une grande femme sèche, acariâtre, et d’un tempérament jaloux. Le docteur, qui était versé dans la connaissance de l’antiquité grecque, se consolait en songeant à Socrate.