Page:Revue des Deux Mondes - 1841 - tome 28.djvu/204

Cette page a été validée par deux contributeurs.
200
REVUE DES DEUX MONDES.

de l’exécuter, l’une applicable aux pays anciennement neustriens, l’autre aux territoires nouvellement conquis. Dans les villes que le royaume de Neustrie possédait depuis le dernier partage, et dont le trésor royal conservait les rôles de cadastre, Marcus, transportant avec lui des copies de ces rôles, devait les rectifier et les compléter par enquête ; quant aux villes détachées, soit de l’Austrasie, soit du royaume de Gonthramn, il devait y saisir les registres du cadastre municipal, et, après vérification de leur exactitude, les expédier au trésor du roi. Telle fut la charge donnée au commissaire gallo-romain, avec ordre de hâter, de tout son pouvoir, le recouvrement des nouvelles taxes.

Il partit du palais de Soissons ou de quelque résidence voisine dans l’hiver de 580, et, soit que sa tournée eût commencé par les villes du nord, soit qu’il eût gagné directement la contrée méridionale, vers la fin du mois de février il se trouvait à Limoges. Cette ville, tant de fois prise et reprise, avait appartenu légitimement au roi Hilperik avant d’être à lui par conquête, et ses rôles de cadastre étaient depuis long-temps déposés dans les archives royales de Neustrie. Elle comptait parmi les cités où le nouveau système d’impôts pouvait s’organiser par un simple travail de vérification des rôles, travail qui toutefois n’était possible qu’au moyen d’une enquête publique, et de déclarations faites par les possesseurs de terres devant la curie ou le sénat municipal. Les Calendes, c’est-à-dire le premier jour de mars, étaient, à ce qu’il paraît, jour d’assemblée solennelle et d’audience judiciaire pour la curie de Limoges[1]. Ce jour-là, les magistrats municipaux et le corps des décurions siégeaient au tribunal ou délibéraient en conseil, et les habitans de la campagne, propriétaires ou colons, venaient en grand nombre à la ville pour leurs procès ou leurs affaires. Ce fut le jour que Marcus choisit pour ses premières opérations ; elles consistaient à donner publiquement lecture des ordres du roi, à obtenir, de gré ou de force, le concours de l’autorité municipale ; enfin, à commencer l’enquête sur l’état des biens situés

    præpositus… (Aimoini monachi floriac., de Gest. Franc., lib. III, cap. XXXI ; ibid., t. III, pag. 81.) — Sous les rois mérovingiens, le titre de référendaire se donnait au chef de la chancellerie, garde du sceau ou de l’anneau royal.

  1. Lemovicinus quoque populus… congregatus in calendis martiis. (Greg. Tur., Hist. Francor., lib. V, cap. XXIX, apud Script. rer. gallic. et francic., t. II, p. 251.) — Hadriani Valesii Rer. francic., lib. X, t. II, p. 102. — Les réunions ordinaires du sénat de Rome avaient lieu chaque mois aux Calendes et aux Ides. (Voy. Adam, Antiquités romaines, t. I, p. 14-15.)