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REVUE — CHRONIQUE.

dressée dans l’orangerie des jardins Boboli. Il n’y avait pas moins de six cents couverts, et la salle était ornée avec une très remarquable élégance. Le soir, on s’est réuni dans l’ancien palais des Médicis, qui a long-temps appartenu à la famille Riccardi, et qui est redevenu la propriété des grands-ducs. La plus grande salle de ce palais est célèbre par les peintures de la voûte, qui sont de Luc Giordano ; c’est le lieu ordinaire des séances publiques de l’académie della Crusca. Le grand-duc ne s’est pas borné à offrir aux membres du congrès, pour leurs réunions du soir, cette belle salle et les galeries de la fameuse bibliothèque Riccardiana, qui sont adjacentes ; là comme ailleurs il pourvoit à tous les frais, et ce n’est pas une petite affaire, car, la société de Florence étant admise à ces réunions, il ne s’agit de rien moins que d’un millier de personnes à recevoir tous les soirs pendant quinze jours.

Ainsi s’est passée cette première journée du congrès, qui a réellement produit une forte impression sur les assistans. Ce mouvement qui semblait renaître dans une ville autrefois si agitée et aujourd’hui si paisible, ces grands souvenirs qui s’élevaient à chaque pas et qui sortaient en quelque sorte de chaque pierre, ce Palais-Vieux où semblait vivre encore l’ancienne république, et ce palais Pitti tout plein de la grandeur des Médicis, les deux âges de Florence représentés par deux monumens et associés dans une même fête, ce concours inaccoutumé qui défilait sur les places publiques, au pied des statues de Michel-Ange et de Benvenuto Cellini, ces sombres palais sortant de leur solitude pour recevoir des hôtes nouveaux, cette conquête pacifique de la science se substituant aux fureurs éteintes des guerres civiles et pénétrant partout à la fois, ce prince intelligent et affable qui se mêlait familièrement à la foule des lettrés, comme autrefois Laurent-le-Magnifique, tout cet ensemble a singulièrement frappé ceux qui en ont été témoins, et si ce congrès n’est pas une grande chose, il en a eu du moins toute l’apparence.

Le lendemain, 16 septembre, les travaux des sections ont commencé. Nous n’entrerons pas dans le détail des discussions. Le grand-duc a assisté à toutes les séances de la section d’agriculture, et a paru de temps en temps dans quelques autres sections. Le dimanche, 19 septembre, une société d’instrumentistes et de chanteurs a donné un grand concert aux membres du congrès dans la salle du Palais-Vieux. Les exécutans étaient au nombre de six cents, et l’oratorio de la Création de Haydn, qui est le complément obligé de ces sortes de solennités, a été chanté avec un grand succès. Un journal des actes du congrès, imprimé tous les soirs, était distribué tous les matins dans les sections. Les réunions du soir, au palais Riccardi, étaient très brillantes, et la table commune réunissait toujours la plus grande partie des membres du congrès. La session a dû être close hier 30 septembre.

Pour que rien ne manquât à la fête, on a fait coïncider avec l’ouverture du congrès l’ouverture d’une exposition des produits de l’industrie et des arts à Florence. L’exposition industrielle est remarquable en ce qu’elle montre les progrès que les manufactures font en Toscane ; on y trouve toute sorte de produits, et la plupart de bonne qualité. Quant à l’exposition des beaux-arts, elle a paru moins satisfaisante. Il y a des intentions spirituelles et une certaine habileté de main dans quelques tableaux du professeur Bezzuoli. Les esquisses exposées par le directeur de l’académie, M. Benvenuti, et d’après lesquelles il a exécuté les peintures du plafond de la chapelle des Médicis, attestent