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notre défaut, de nous jeter corps perdu dans toutes sorte de bâtisses bientôt abandonnées. Nous sommes enfin guéris de cette maladie ; aujourd’hui l’on achève et l’on restaure. — Idée toute nouvelle pour des têtes françaises. — Tout ce qui semblait interminable est arrivé à fin, l’arc-de-triomphe, le palais du quai d’Orsay, le palais des Beaux-Arts, la Madelaine, l’Hôtel-de-Ville, la colonne de Juillet, l’éléphant de la Bastille lui-même a été débarrassé de sa carapace de planches, et finira triomphalement par souffler l’eau de sa trompe de bronze. Saint-Denis, qui chancelait sous sa haute vieillesse, a été raffermi et rajeuni de manière à pouvoir vivre encore bien des siècles ; Saint-Germain-l’Auxerrois a été soigneusement pansé des blessures de l’émeute. On remet dans les niches de Notre-Dame les statues que 93 en avait précipitées. Toutes les statues deux fois martyres qui ont perdu leur nez, leurs doigts ou leur tête, soit par le fait du temps, soit par le fait des hommes, en reçoivent de tout neufs, approchant le plus possible de leur style antique. Les plans de la Sainte-Chapelle ont été retrouvés, ce qui donne toute sécurité et tout certitude à la restauration qu’on en va faire. L’on a orné d’une fontaine de M. Klagmann, la plus jolie et la plus complète peut-être qui soit dans Paris, l’emplacement de l’ancien Opéra, sur lequel devait s’élever le monument expiatoire. — Ce vaste champ que l’on appelle place Louis XV, place de la Révolution ou de la Concorde, et que rien ne semble pouvoir remplir, a été meublé d’obélisque, de fontaines, de statues, de colonnes lampadaires, et, si ces embellissemens sont d’un goût médiocre, la faute n’en doit être imputée qu’aux artistes chargés de leur exécution, et que rien n’empêchait de faire des chefs-d’œuvre.

Puisque nous voilà tout portés sur la place de la Concorde, traversons, en manière de transition oratoire, le pont débarrassé de ses douze colosses, en tête duquel on devrait bien élever, en marbre, les colonnes de carton-pierre qui lui donnaient tant d’élégance aux fêtes des funérailles de l’empereur, et occupons-nous d’abord du fronton de M. Cortot à la chambre des députés, œuvre importante et consciencieuse, sinon remarquable.

La chambre des députés n’est pas un monument qui nous réjouisse beaucoup en lui-même, ni par son extérieur, ni par son intérieur. C’est du grec maussade et mal compris, du classique et non de l’antique. Les colonnes, trop grêles, trop longues et trop rapprochées, font l’effet le plus disgracieux ; les deux ailes, aveugles et sans autre ornement que deux bas-reliefs, offusquent l’œil par leur nudité ; mais,