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un courage éprouvé. Les Danakiles sont des peuples pasteurs ; ils n’ont aucune industrie, et leur commerce se borne à la fonction de conducteur de caravanes. Les femmes sont fort belles dans ces tribus, elles n’ont, dans leurs traits, aucune trace du caractère nègre. L’ovale du visage est régulier, les lignes sont assez pures ; Les yeux ont de l’éclat, les dents sont d’une blancheur éclatante. Une peau de bœuf assouplie leur sert de vêtement, et laisse presque toujours le buste à découvert. Tous les habitans du pays d’Adel parlent le même dialecte, dialecte particulier qui n’est ni l’arabe, ni l’amharic, ni le galla. On retrouve chez eux le mot de kabile, formé de gobayl (tribu), mot usité dans l’Atlas comme dans l’Arabie, et qui pourrait rattacher ces nomades épars, quelles que soient les distances qui les séparent, à une origine commune.

M. Rochet touche enfin au but ; il entre dans le royaume de Choa : ses efforts n’ont pas été vains. À la richesse, à la symétrie des cultures, il reconnaît sur-le-champ un pays civilisé. La main de l’homme y est non-seulement patiente, mais intelligente, et l’on a beaucoup ajouté à la plus admirable nature. Tiannou élève ses toits coniques du sein d’un massif verdoyant, la plaine étale au loin ses richesses, et des montagnes chargées de forêts occupent toutes les lignes de l’horizon. À quelque distance du village, le voyageur vit venir à lui un chef abyssin : c’était le lieutenant du gouverneur qui le conduisit, avec les plus grands égards, dans une habitation où il devait attendre les ordres du roi de Choa. Dès ce jour, la table de l’Européen fut largement défrayée ; on tua un bœuf en son honneur, on lui servit de l’hydromel, du très bon pain et du miel excellent. Son habitation, comme toutes celles de l’Abyssinie, était construite en palissades de bois parfaitement jointes et crépies à l’intérieur à l’aide d’un mélange de terre et de sable blanchâtre. Ces demeures sont cylindriques : le chaume qui les surmonte se termine en cône. Basses, quoique assez spacieuses, elles n’ont point de fenêtres et reçoivent le jour par une large porte d’entrée. Au-delà du seuil règne une galerie circulaire qui fait le tour de la maison ; le corps de logis se divise en compartimens qui débouchent sur ce corridor. Au centre se trouve une espèce de rotonde qui sert à la fois de salle de réception, de salle à manger et de cuisine. L’ameublement est de la plus grande simplicité : le sérir, pliant en cuir qui sert à la fois de lit et de siége, en est le principal élément. Des armures suspendues aux murailles, des vases en terre cuite d’une forme très élégante, des paniers en osier finement tressé, complètent ce mobilier. Un petit