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calisme pour s’assurer que rien de tout cela n’est fort sérieux pour lui. La réforme, nous l’avons dit, c’est la première brèche ouverte à la muraille : le radicalisme le crie assez haut pour que chacun l’entende et le sache bien ; aussi cela est-il désormais parfaitement clair pour le pays. C’est pour cela que celui-ci ne se préoccupe guère d’une telle conquête, non plus que des mesures accessoires destinées à la préparer, c’est pour cela que l’opinion républicaine fait presque exclusivement les frais d’un mouvement qui, en réalité, ne profiterait qu’à elle seule. Le pouvoir n’a point à s’en émouvoir ; peu d’efforts lui suffiront pour y résister ; ce n’est pas au profit de ces conceptions bâtardes et de ces avortemens législatifs, qui ne satisferont en dernier résultat à aucune espérance, qu’il doit dépenser ses lumières, ses ressources et la puissance d’initiative qui gît en lui.

La réforme électorale, aux yeux du seul parti qui la poursuive avec ardeur, est donc la première pierre du nouveau monument qu’un prochain avenir doit élever sur un plan inconnu ; mystérieux édifice dont il faut que le sang cimente les assises, et à l’abri duquel l’humanité vivra libre des soins et des soucis qui la consument sous un régime d’oppression et d’inégalité. À ce second degré de la révélation démagogique se produisent et les confuses pensées, et les sceptiques hallucinations, et les criminelles révoltes contre la conscience des peuples et contre l’histoire. Nier Dieu dans sa justice rémunératrice, contester à l’être humain son libre arbitre, à la famille et au mariage leur perpétuité, à la propriété son caractère, tel est le thème qu’exploitent chaque jour, sans répression comme sans remords, des philosophes imberbes, des manœuvres ignorans et de sacriléges apostats. Dans cette lie de la société viennent se confondre, au risque d’y souiller leur honnêteté naïve, quelques théoriciens et quelques rêveurs sincères, pour lesquels le malheur des temps a interrompu le cours régulier des traditions éternelles, chacun aspirant à transformer la face de la terre par un renouvellement fondamental de la nature humaine. Ici la tâche du pouvoir est claire et facile. Distinguant avec soin la liberté légitime de l’intelligence de ce qui tient à la perversité du cœur, qu’il livre sans pitié à la justice du pays et ces traités et ces romans et ces pamphlets de tout format qui dogmatisent l’immoralité ou qui la suintent ; qu’il n’hésite pas à engager une lutte quotidienne et acharnée contre ces conceptions monstrueuses que le monde contemple avec épouvante et dégoût, et dont la circulation impunie retrancherait bientôt la France de la commu-