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ÉTUDES SUR L’ALLEMAGNE.

cile de décider, et l’on peut croire que ces divers motifs entraient tous pour quelque chose dans leur détermination. Quoi qu’il en soit, l’avortement complet de cette entreprise rendit visible à tous les yeux la faiblesse du parti révolutionnaire en Allemagne, lui enleva cette considération qui naît de la frayeur qu’on inspire, et lui ravit, pour quelques années au moins, tout espoir d’exercer une action directe. Nous n’avons pas besoin d’ajouter qu’une pareille tentative augmenta la force des gouvernemens, justifia aux yeux du grand nombre les mesures qu’ils avaient prises, et leur fournit un prétexte plausible pour redoubler de surveillance et de sévérité.

Le parti constitutionnel avait eu grand soin, dès le commencement, de séparer sa cause de celle des révolutionnaires, et il avait protesté dans l’occasion contre leurs tendances et leurs desseins ; mais l’esprit qui s’était manifesté dans les assemblées représentatives depuis la révolution de juillet paraissait à la diète plus dangereux encore que les opinions violentes du parti exalté. En effet, des réclamations très vives en faveur de la liberté de la presse s’y étaient fait entendre ; on y avait attaqué le régime établi en Allemagne depuis 1819 au nom de l’indépendance des états particuliers et des stipulations positives du pacte fondamental ; on y avait soutenu que les décrets de l’autorité fédérale ne pouvaient pas prévaloir contre les dispositions formelles des constitutions ; on s’était même efforcé de faire pénétrer jusqu’au sein de la diète l’influence parlementaire, en demandant compte aux gouvernemens des votes émis par leurs agens dans le conseil suprême de la confédération. De semblables prétentions remettaient en question l’omnipotence de l’assemblée fédérale et tout le système sur lequel reposait la prépondérance des deux grandes puissances absolutistes. La diète y répondit par les décrets du 28 juin 1832 lesquels, comme nous l’avons vu, plaçaient les assemblées d’états sous sa surveillance immédiate. Il y eut des résistances, ou plutôt des protestations dans la plupart des pays constitutionnels ; mais que pouvaient ces démonstrations contre les pouvoirs nouveaux dont les gouvernemens venaient d’être armés ? La presse était enchaînée, les associations politiques étaient prohibées, ce qui laissait la tribune sans échos et sans point d’appui au dehors. Là où il y avait deux chambres, le pouvoir était sûr d’être soutenu par la chambre aristocratique ; il avait toujours son veto constitutionnel, son droit d’exclusion[1], son droit de dissolution, et ses nombreux moyens

  1. La plupart des constitutions donnent aux gouvernemens le droit d’exclure