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en Phryife long-temps avant que les peuples de la Grèce fussent formés en états réguliers.

Jamais les fils de Pélops n’abandonnèrent leurs droits sur les provinces asiatiques, et, lorsque les Grecs se ruèrent sur l’empire de Priam, ils venaient bien moins pour venger l’injure faite à Ménélas que pour reprendre un patrimoine inaliénable. Aussi, après la ruine de la ville phrygienne, voyons-nous les fils d’Agamemnon ramener des colonies dans le pays de leurs ancêtres, et jeter les fondemens des principales villes de l’Éolide.

Pendant que les Phrygiens s’étendaient dans l’intérieur de la contrée, d’autres peuples thraces vinrent s’établir sur les côtes de la Propontide ; et, pour se distinguer de leurs compatriotes qui les avaient précédés, ils prirent le nom des lieux sauvages où ils campèrent au moment de leur arrivée au milieu des forêts de hêtres de l’Olympe. Ils furent appelés Mysiens parce que mysos signifie un hêtre dans leur langue[1]. Cependant les historiens grecs les nommèrent toujours Thraces de Bithynie, et Hérodote nous apprend que ces tribus vinrent des bords du Strymon pour s’établir dans les contrées fertiles auxquelles elles ont donné leur nom[2].

Tous ces petits royaumes formés par des peuples venus d’Occident furent à peine constitués, que la grande invasion des Perses vint leur porter une rude atteinte. L’Asie mineure devait être le champ-clos où se livrait la grande lutte entre l’Orient et l’Occident que la valeur des Grecs termina à l’avantage de l’Europe.

Les conquêtes d’Alexandre repoussèrent les Perses au-delà de l’Euphrate, tous les royaumes de l’Asie mineure furent occupés militairement par des lieutenans de ce prince ; mais, à sa mort, Botiris, chef thrace, s’empara d’Astacus, ville de la Propontide, chassa Calanthus, commandant les forces macédoniennes dans la contrée, et établit une principauté indépendante qu’il transmit, par ses descendans, jusqu’à Nicomède, qui, après la mort de Lysimaque, prit le titre de roi de Bithynie.

Ainsi lorsque les Gaulois arrivèrent en Asie, ils se trouvèrent en rapport avec des peuples étrangers comme eux, et comme eux venus d’Europe : les Grecs, les Phrygiens, les Mysiens et les Bithyniens.

À peine Nicomède fut-il monté sur le trône, qu’il se trouva menacé par Zipœtès, un de ses frères, chef d’un parti puissant et gouverneur d’une portion de la Bithynie, qui voulait régner sans

  1. Strab., XIII, 572.
  2. Thucyd., IV, 75. — Xen. Anab., 7-32, 111-22.