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tory, et en 1821 il remplaça, comme ministre de l’intérieur, lord Sidmouth, qui venait de se retirer. En 1822, quand M. Canning succéda à lord Castlereagh, sir Robert Peel resta ministre. On put remarquer alors en lui deux tendances bien distinctes. Pour tout ce qui touche au système politique, soit à l’intérieur, soit à l’extérieur, sir Robert Peel se montra fidèle aux vieilles traditions tories et ennemi décidé de toute réforme. Pour tout ce qui touche à l’administration et à la législation criminelle, il fit preuve d’un esprit large, éclairé, souvent même hardi. Ainsi on le vit, d’un côté, soutenir vivement l’alien bill, combattre l’émancipation catholique, louer la sainte-alliance ; de l’autre, adoucir la pénalité, réformer le jury, limiter la juridiction des juges de paix. Grace à ce double caractère, sir Robert Peel eut le double avantage de conserver la faveur des vieux tories et de gagner jusqu’à un certain point celle des réformateurs.

Cependant vers la fin de 1826 et sous la présidence impartiale de lord Liverpool, il existait en réalité deux partis dans le ministère, celui de lord Eldon et de lord Westmoreland, celui de M. Canning et de M. Robinson (depuis lord Goderich, aujourd’hui lord Ripon), le premier refusant à l’esprit du siècle la plus légère concession, surtout en ce qui concerne l’église, le second comprenant que la vieille politique avait fait son temps. Entre ces deux partis, sir Robert Peel, avec une remarquable prudence, avait soin de garder la plus stricte neutralité. Toutefois, en 1827, à la mort de lord Liverpool, cette neutralité cessa d’être possible. À cette époque, on s’en souvient, M. Canning, premier ministre, fit alliance avec les whigs, et appela dans le cabinet le duc de Devonshire, lord Landsdowne, lord Carlisle, et même le chef honoraire de l’opposition, M. Tierney. Il va sans dire que lord Eldon et lord Westmoreland sortirent du ministère, mais on fut quelque peu surpris de voir sir Robert Peel suivre leur exemple. Pendant quelque temps néanmoins, il s’assit sur les bancs neutres, et affecta de se proclamer l’ami de M. Canning ; mais bientôt son amitié devint aigre et sa bienveillance offensive ; puis, sur une vive provocation de M. Canning, il prit son parti et alla s’asseoir à la place que M. Brougham venait de quitter. À dater de ce jour, il fut le chef de l’opposition tory, dont pourtant il se garda bien d’épouser toutes les folies.

En 1828, après la mort de M. Canning et l’avortement du ministère Goderich, sir Robert Peel devint l’homme principal du ministère Wellington, surtout après que les amis de M. Canning, M. Huskisson, lord Dudley, M. Grant et lord Palmerston, s’en furent séparés. Dans