Page:Revue des Deux Mondes - 1841 - tome 27.djvu/279

Cette page a été validée par deux contributeurs.
275
LITTÉRATURE DE L’ARCHIPEL D’ASIE.

Quels peuples arrivèrent les premiers dans l’archipel d’Asie ? Les Indous, sans aucun doute, qui en étaient séparés par la plus courte distance, et qui n’avaient qu’à ouvrir les voiles de leurs navires aux moussons, dont la périodicité rend la navigation de ces mers si facile. On voit déjà dans le périple que l’on construisait dans l’Inde des vaisseaux sur lesquels on longeait la côte de Coromandel pour se diriger ensuite vers le Gange, et jusqu’à la presqu’île orientale ou de Malaca, laquelle portait le nom de Chrysè, c’est-à-dire Dorée, à cause de l’or que l’on en tirait en abondance. La preuve que j’ai déduite, en rapprochant le périple du tarif de douanes décrété par Marc-Aurèle, que ce ne fut pas avant le deuxième siècle que les productions de l’archipel d’Asie furent connues dans l’Occident, s’accorde avec le témoignage des écrivains malays et javanais sur l’arrivée des colonies indoues à Java dans le premier siècle de notre ère ; date après laquelle on peut supposer qu’il fallut un siècle d’intervalle pour que ces productions, répandues dans l’Inde, aient été de là dirigées vers les marchés de l’Égypte.

Les peuples qui habitent les côtes de l’Arabie, peuples essentiellement navigateurs et marchands, et que les annalistes hébreux et les historiens d’Alexandre nous représentent comme livrés, depuis la plus haute antiquité, à un trafic suivi avec l’Inde, durent naturellement en rapporter les produits qui y avaient été nouvellement introduits de l’archipel d’Asie. De leurs mains les marchandises de l’Inde passaient dans celles des Grecs d’Égypte, qui, par la navigation de la Méditerranée, les distribuaient dans toutes les parties du monde occidental, et qui furent, jusqu’à la destruction de l’empire romain, les agens de ce commerce intermédiaire dont les Phéniciens avaient été les maîtres dans les temps antérieurs, et qui plus tard, au moyen-âge, fit la fortune des républiques italiennes. Depuis l’époque où s’établirent les premiers rapports des Indous avec les indigènes de l’archipel d’Asie jusqu’au milieu du Vie siècle, le seul écrivain qui fasse une mention expresse du commerce oriental, c’est Cosmas, surnommé l’Indicopleustes, dont l’ouvrage porte la date de 547. Il n’en est pas moins certain que, pendant toute cette période, ces relations conservèrent une très grande activité. L’usage des épices de l’archipel d’Asie était devenu un besoin pour les peuples occidentaux, et d’ailleurs ces produits ont formé dans tous les temps une branche trop lucrative de commerce, pour supposer qu’elle ait été négligée après avoir été une fois connue. Il est certain