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Djebel-Dokhan (montagne de la fumée), a tous les caractères d’une ancienne ville, restes de rues et de maisons, place publique, citernes, temple, forteresse. On y trouve encore les boutiques et ateliers où l’on travaillait le porphyre, ainsi qu’un grand nombre de mortiers et d’autres ustensiles non achevés ; les carrières se trouvent dans les montagnes voisines, qui offrent encore de nombreux débris d’exploitation.

Le second, situé dans le Djebel-Fateereh, à environ 80 kilomètres plus au sud, est aussi considérable que le premier ; il présente les mêmes particularités et le même aspect ; il était aussi le centre d’une population que l’on estime avoir été au moins de 1,500 à 2,000 individus. Mais ici l’exploitation était exclusivement granitique. On l’avait entreprise sur la plus grande échelle, comme l’attestent les débris qui en restent dans toute l’étendue de ces carrières, puisqu’on y trouve une multitude de colonnes, ébauchées ou terminées, de toutes les grandeurs, jusqu’à l’énorme dimension de 18 mètres de long.

À la vue de ces énormes matériaux, on se demande par quelle voie ils étaient transportés à Alexandrie. Les deux voyageurs que je viens de citer pensent qu’on les amenait jusqu’au Nil par la route du désert ; mais la distance, non moins que la nature du terrain, s’y oppose, car les deux carrières sont à 80 ou 100 kilomètres du Nil, dont elles sont séparées par plusieurs vallées transversales que partagent des versans plus ou moins élevés.

Sans doute, les principaux produits de l’exploitation du porphyre dans le Djebel-Dokhan ont pu assez facilement arriver au Nil par la voie de terre : les urnes funéraires, les mortiers, quelques ornemens d’architecture, pouvaient être apportés par cette route ; mais la difficulté devenait déjà considérable pour des baignoires telles que les deux qui sont déposées, l’une à la Bibliothèque royale, l’autre au musée du Louvre, et qui sont en porphyre égyptien. Elle était énorme pour des objets d’un plus grand volume, tels, par exemple que la grande vasque du Vatican, qui a 14 pieds (4 mètres 5 centimètres) de diamètre ; celle du musée de Naples, qui a 10 pieds (3 mètres 23 centimètres) de diamètre, près de 5 pieds (1 mètre 62 centimètres) de hauteur, et dont les anses en forme de serpens sont prises dans la masse ; le mausolée de sainte Hélène, mère de Constantin ; le tombeau antique qui est devenu celui de Benoît XIII, à Saint-Jean-de-Latran, et la statue probablement de Dioclétien, haute de 11 pieds