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GALILÉE.

doute à former ce style admirable auquel le grand philosophe toscan doit en partie ses succès. Les progrès qu’il fit dans les langues savantes et dans la logique, qu’il étudia sous un moine de Vallombrosa, son aptitude à la peinture et à la mécanique, ses succès étonnans dans la musique, élevèrent les espérances de son père, qui, abandonnant l’idée de faire de lui un marchand de laine, voulut qu’il se livrât à la médecine, seule science qui pût alors mener à la fortune. On ne saurait s’empêcher de remarquer ces facultés multiples d’un homme destiné à produire une révolution complète dans les sciences, et à devenir en même temps le premier écrivain italien de son siècle ; d’un homme qui a mérité que les plus illustres peintres, les Bronzino, les Cigoli, le consultassent avec déférence, et qui était à la fois le plus habile joueur de luth et le plus subtil dialecticien de son temps ; esprit singulier, capable de méditer profondément sur les plus sublimes vérités de la philosophie naturelle, et d’improviser une comédie. Ces facultés si éminentes et si diverses ne pourraient-elles pas faire penser qu’il y a dans l’homme un principe unique susceptible d’être appliqué à toute chose sans que les dispositions qu’on appelle naturelles soit appelées à jouer un rôle prédominant ? Sans sortir de l’Italie, Dante, Politien, Léonard de Vinci, Galilée, Magalotti, Redi et tant d’autres qu’on pourrait nommer, ne semblent-ils pas prouver qu’une haute intelligence, réunie à une volonté forte, triomphe de tous les obstacles, et que les hommes ainsi doués peuvent s’illustrer également dans toutes les branches des connaissances humaines ?

Envoyé à dix-sept ans par son père à l’université de Pise pour y étudier la médecine, Galilée suivit d’abord les cours de philosophie, qui comprenaient alors les sciences métaphysiques et mathématiques. Excepté un seul, tous ses professeurs, qui étaient péripatéticiens, expliquaient Aristote. Jacques Mazzoni, qui exposait les doctrines des pythagoriciens, devint le guide de Galilée. Il lui enseigna cette physique que l’on connaissait alors ; et Galilée se livra d’abord aux généralités et aux applications avant de posséder cet instrument précieux, les mathématiques, que dans la suite il ne cessa d’appliquer à l’étude de la philosophie naturelle. Cependant son esprit observateur devança les années, et il n’étudiait encore que la médecine, lorsqu’un jour, ayant vu dans la cathédrale de Pise une lampe suspendue que le vent agitait, il remarqua que les oscillations, grandes ou petites, s’effectuaient en des temps sensiblement égaux. Cette remarque, qui a eu de si importantes conséquences, fut dès l’origine