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d’Young, la tristesse de l’Allemagne et de l’Angleterre. Il écrivit un roman sentimental, Ferdinand et Constancia, qui parut une véritable hérésie aux yeux des positifs Hollandais. L’idée de la mort revient souvent dans ses œuvres ; tantôt il la montre sous un voile funèbre, au milieu d’un chant d’amour, tantôt il l’exprime en quelques vers brefs et sentencieux, comme ceux-ci :

« La race humaine tombe comme les feuilles des arbres. Nous naissons et nous passons. Le berceau touche à la tombe. Entre ces deux limites, un rêve nous séduit, un drame se déroule dans le cœur. Notre existence va de l’affliction à la joie et de la joie à l’affliction ; le roi monte sur son trône, l’esclave se courbe devant lui, — la mort souffle sur le théâtre, et tous deux ont cessé d’être. »

Feith a écrit aussi un poème en quatre chants, intitulé les Tombeaux, plus imposant que les Méditations d’Hervey et d’une tendance d’idées plus générales que les Sepolcri d’Ugo Foscolo[1].

Helmers, né à Amsterdam en 1767, a consacré la plupart de ses chants à célébrer la gloire ou à déplorer les malheurs de son pays. En 1793, il peignit, dans un poème intitulé de Geest des Kwads (le Génie du Mal), la révolution qui allait éclater en Hollande. Plus tard, il raconta en vers enthousiastes la lutte que les Hollandais ont soutenue contre la France en 1672 et 1678. Son œuvre capitale, De Hollandsche Natie (la Nation hollandaise), est une sorte de panégyrique en six chants long et froid, dans lequel l’auteur retrace les vertus caractéristiques, les actions d’éclat de ses compatriotes, et les époques les plus brillantes de leur histoire. La pensée de patriotisme qui l’inspira en a fait le succès. Ce poème me rappelle une anecdote qui ajoute un trait assez curieux à tout ce que l’on a déjà raconté des susceptibilités de la police impériale. Dans le second chant, le poète gémit sur la décadence de sa nation ; mais il espère que cet état de douleur et d’affaissement ne sera que de courte durée. L’ombre de Vondel se montre à ses yeux et lui présage l’apparition prochaine d’un astre réparateur. La censure impériale exigea que l’auteur joignît une note à ce passage, une petite note fort douce, où il était dit que l’astre réparateur annoncé par Vondel venait de luire, et que c’était Napoléon.

Ajoutons aux divers ouvrages que nous venons de citer, une très

  1. Ce poème a été traduit en vers français par un écrivain de Maëstricht, M. Clavareau.