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DE L’ARIANISME.

Arius, loin d’accepter cette sentence, s’adressa à Eusèbe de Nicomédie pour la faire révoquer. Eusèbe répondit favorablement à cet appel, et entama à ce sujet une correspondance avec Alexandre. De son côté, Arius se donnait beaucoup de mouvement pour sa défense ; il écrivit à plusieurs évêques qui avaient été autrefois ses amis et ses condisciples ; il passa en Palestine pour s’assurer de nouveaux partisans ; il se rendit à Nicomédie auprès d’Eusèbe, qui gagna aux nouvelles opinions Constance, sœur de l’empereur. Les femmes en général se déclarèrent pour les innovations de l’arianisme. Épiphane raconte que dès l’origine plusieurs centaines de vierges consacrées au seigneur embrassèrent cette hérésie. Ces défections allumèrent la colère de l’évêque Alexandre, qui dans sa lettre, parle avec mépris des femmes ariennes. Cependant Eusèbe de Nicomédie, qui avait tout-à-fait adapté les doctrines de son protégé, s’adressa à Paulin, évêque de Tyr, pour l’engager à écrire en leur faveur, en s’appuyant sur l’Écriture sainte ; en outre, de concert avec l’évêque de Césarée et plusieurs prêtres, il déclara l’innocence d’Arius. Enfin, pour employer les expressions de Théodoret, on ne voyait plus en Égypte et en Palestine combattre comme autrefois les chrétiens et les gentils ; mais les chrétiens membres d’un même corps se combattaient entre eux.

Ce fut pour Constantin un rude embarras d’avoir à s’entremettre et à se prononcer entre des discussions aussi ardentes et aussi délicates. Il comblait de faveurs la religion chrétienne ; tous ses édits tendaient à l’exalter aux dépens de l’ancien culte. Il avait ordonné que l’on rappelât tous ceux qui avaient été bannis pour avoir embrassé la foi nouvelle, et que l’on rendît les biens des martyrs à leurs familles. Il venait de s’adresser directement aux provinces de l’empire pour exhorter tous ses sujets à renoncer au polythéisme. Dans la lettre qu’Eusèbe de Césarée dit avoir traduite du latin en grec sur l’original écrit de la propre main de l’empereur, Constantin déplorait les persécutions exercées contre les chrétiens, persécutions dont il avait été contraint d’être, pendant sa jeunesse, le spectateur impuissant ; il se présentait comme le réparateur de tant de maux, il suppliait Dieu de regarder d’un œil favorable les peuples d’Orient ; il exhortait ces peuples à profiter de la paix pour embrasser la vraie religion ; toutefois, il laissait une entière liberté de conscience, et il consentait à ce que les temples consacrés au mensonge restassent debout. C’est au milieu de ces pensers et de ces soins que lui parvint la nouvelle des troubles religieux qui désolaient l’Égypte.