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L’ancienne enceinte de Bakou est remarquable par l’élévation et l’épaisseur des murailles. Les portes ne sont qu’au nombre de deux. Un monument en ruines qui mérite de fixer l’attention, l’ancien palais des khans, domine la ville et le port de Bakou. Ce palais ressemble plutôt à une forteresse qu’à la résidence d’un prince. L’intérieur ne contient plus que quelques traces des peintures qui recouvraient les murs ; depuis quarante ans, l’ancienne demeure des khans est abandonnée.

Je montai sur une tour appelée Kissi-Koulessi (tour de la demoiselle) ; une plate-forme placée sur le sommet de ce monument en indique la destination. De cette plate-forme, on pouvait signaler en effet soit l’approche de l’ennemi, soit la présence de quelque bâtiment en mer. La construction de cette tour remonte au même temps que celle des murs d’enceinte, c’est-à-dire au règne des Sassanides. Si l’on ajoute à ces édifices des bazars occupés par des Persans et des Arméniens et d’assez grands karavansérails, on aura la liste complète des monumens qui rappellent à Bakou la domination de la Perse. Les Russes ont élevé quelques maisons d’un aspect blanc et uniforme qui nuit à l’effet des anciennes murailles.

On me montra, à près d’une verste de la côte, un bas-fonds qui, jadis habité, communiquait avec la terre par une chaussée dont on retrouve encore les traces. Les habitans croient qu’un soulèvement volcanique a amené la submersion de cet isthme, qui se prolongeait à une grande distance dans la mer. Le sol de Bakou contient assez de matières volcaniques pour que l’on puisse admettre sans difficulté les traditions conservées à ce sujet par les habitans, quand elles ne dépassent pas la limite des probabilités.

Je fus visiter les sources de naphte qui sont au nombre de quatre-vingt-quatre, et s’étendent dans un rayon de sept verstes. Ces sources sont plus ou moins abondantes ; quelques-unes donnent par jour quinze cents kilog. de naphte. Le naphte surnageant toujours, il suffit de le recueillir. Après quelques heures de repos, l’eau se sépare du naphte par des ouvertures qui lui livrent une issue. Les puits de naphte noir sont éparpillés de divers côtés ; ceux de naphte blanc sont réunis dans une seule vallée ; leur produit est beaucoup moins considérable que celui des autres. Ces puits, au nombre de quatorze, ne donnent que douze cents kilog. par mois. Le prix du naphte blanc est aussi beaucoup plus élevé que celui du naphte noir, car il se vend quatre vingt francs les quatre cents kilog. On avait cherché, en dégageant le naphte de la quantité d’eau qu’il contient au sortir des réservoirs,