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LES ESCLAVES DANS LES COLONIES ESPAGNOLES.

rique. Après de vifs débats dans le conseil du roi don Fernando, on résolut d’envoyer des nègres pour remplacer les indigènes. Depuis 1501 jusqu’en 1506, il fut permis d’en introduire un petit nombre dans Hispaniola, aujourd’hui Saint-Domingue, mais sous la triple condition qu’ils seraient choisis parmi les Africains, élevés et instruits dans la religion catholique à Séville, et qu’à leur tour ils instruiraient les Indiens. En 1510, le roi don Fernando expédia encore de Séville cinquante nègres destinés au travail des mines.

Le nombre des Indiens natifs diminuait chaque jour : ils se pendaient aux arbres ou émigraient aux Florides. Le roi ordonna qu’on les ménageât davantage, et surtout qu’on les laissât en liberté ; mais ils étaient si faibles et si peu endurcis à la peine, que quatre jours de travail d’un Indien ne valaient pas la journée d’un Africain ; on se vit obligé d’augmenter le nombre des nègres que le gouvernement faisait importer pour son compte. À cette époque, le monopole s’empara de la traite. Charles-Quint autorisa les Flamands, en 1516, à introduire quatre mille nouveaux esclaves à Saint-Domingue, et plus tard le même nombre fut concédé aux Génois. Déjà vers ce temps, et bien que nul traité semblable ne fasse mention de l’île de Cuba, les chroniques parlent d’une révolte d’esclaves qui éclata dans la sucrerie de don Diégo, colon, fils de don Cristobal ; ce qui porterait à croire qu’on avait introduit quelques nègres par contrebande. Quoi qu’il en soit, ce ne fut qu’en 1521, immédiatement après la mort de Vélasquez[1], que pour la première fois les Flamands amenèrent, avec l’autorisation du roi, trois cents nègres à Cuba. Les immenses bénéfices de la traite avaient attiré en Amérique un si grand nombre de Flamands, que, dans plusieurs contrées, le nombre de ces derniers ayant surpassé celui des Espagnols, ils ne craignirent pas d’attaquer les anciens conquérans, qui les repoussèrent. Néanmoins, la cour d’Espagne prit l’alarme, le système de prohibition prévalut de nouveau dans le conseil du roi, et ce ne fut qu’en 1586 que don Gaspar de Peralta obtint un nouveau privilége pour introduire à Cuba deux cent huit esclaves, moyennant la redevance de 2,340,000 maravédis, ou 6,500 ducats. Un second privilége fut accordé à Pedro-Gomez Reynal, pour vendre trois mille cinq cents esclaves par an pendant neuf années, à condition qu’il paierait au roi 900,000 ducats par an ; enfin, en 1615, un troisième monopole fut accordé à Antonio-Rodriguez d’Elvas, moyennant 115,000 ducats par an.

  1. Premier gouverneur de l’île de Cuba, immédiatement après la découverte de Fernand Cortez.