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PHILOSOPHIE DE M. BUCHEZ.

clare, au chap. XVII du XXIIe livre de la Cité de Dieu, que les femmes ressusciteront dans leur sexe. Cela est important surtout pour les intéressées. Quoi qu’il en soit, M. Buchez rejette la Somme tout aussi bien que la Philosophie de Lyon, et il se trouve tout à coup en présence des écoles contemporaines.

Sans parler des singulières critiques de M. Buchez, il semble qu’on a sujet de s’étonner de le voir passer si vite sur les anciennes philosophies, et faire des choix aussi disparates. Cet étonnement se renouvelle chaque fois qu’on rencontre dans ce livre des discussions historiques. Si M. Buchez traite de la nature des idées, il énumère les opinions des diverse écoles sur ce sujet, et les doctrines qu’il passe en revue sont celles de Timée de Locres, Platon, Aristote, Épicure, la logique de Lyon, Port-Royal, M. Laromiguière et M. Laurentie. À la fin du second volume, il place un appendice historique, et les quatre phisolosphies qu’il juge à propos d’y résumer sont la logique de Raymond Lulle, celle de Ramus, le système de Kant, et la théorie de Rosmini sur l’idée. Pourquoi mettre à cette place quelques articles de dictionnaire, et pourquoi précisément ceux-là ? On s’y perd. Au sujet de la matière, l’auteur déploie encore une grande érudition ; il recherche le sentiment des Indiens et celui des Romains, puis il donne la définition d’Hésiode, puis trois autres qu’il attribue, on ne sait pour quel motif, à Aristote ; de là il passe sans intermédiaire à la scholastique, dont il donne l’opinion, comme si, sur le point le plus obscur de la science, la scholastique avait été unanime ; puis vient Descartes, puis l’abbé Para du Phanjas, Leibnitz et Boscowitz.

M. Buchez a voué une grande haine aux méthodes grecques, ou indo-grecques, comme il les appelle, et une grande partie de sa réforme consiste à substituer à ces méthodes si défectueuses des procédés qu’il regarde comme nouveaux. Nous ne voudrions pas dire à M. Buchez qu’il critique ce qu’il ignore ; et cependant, comment dissimuler un fait dont chaque page de son livre apporte de nouvelles preuves ? La première de ses erreurs consiste à regarder la philosophie grecque comme un développement de la philosophie orientale. C’est une opinion qui a eu cours autrefois, mais que l’on a été obligé d’abandonner dès qu’on a pris le parti d’étudier les anciennes doctrines dans les textes mêmes. Le caractère grec est tellement opposé au génie oriental, qu’il faut, pour les confondre, être aveuglé par quelque préoccupation systématique, ou n’avoir lu les opinions des anciens que dans des historiens ou des compilateurs. Il