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qu’il ne voulait pas renoncer à des prétentions légitimes : « De par Dieu ! s’écriait-il comme le violent et perfide monarque, en frappant mortellement son contradicteur d’un coup de poignard ; de par Dieu ! voilà qui saura bien te faire changer ! »

Ce qui distinguait peut-être un tel homme de l’Italien, c’était le mépris du danger, c’étaient des nerfs moins délicats qui le rendaient moins sensible à la douleur physique, moins accessible aux appréhensions morales, et qui ne lui permettaient ni d’avouer, ni même de connaître, comme l’Italien, le sentiment de la peur. Il avait le courage des champs de bataille. Il aimait mieux mourir que de racheter sa vie par un acte de faiblesse. Un crime lui coûtait moins qu’une lâcheté

Nous pourrions pousser plus loin ce rapprochement sans craindre qu’on nous accuse de paradoxe, ces défauts et ces qualités appartenant en quelque sorte à tous les hommes d’état de l’époque, Italiens ou Écossais, Anglais ou Français. Chaque siècle a ses vices caractéristiques, et chaque nation participe, plus ou moins, de ces vices de son âge. Les farouches politiques de l’Écosse, qui se servaient si volontiers du poignard, étaient contemporains des massacreurs de la Saint-Barthélemy. Le même siècle voyait naître les Borgia, les Henri VIII, les Christiern, les Médicis et les Philippe II.

Les mœurs du peuple, également barbares, furent néanmoins plus originales et moins soumises aux influences du dehors. Celles des habitans des hautes terres (highlanders) sont trop connues, et ont été trop bien décrites, pour que nous en présentions ici le tableau. Les récits de Walter Scott ont naturalisé parmi nous ces sauvages montagnards. Ils nous ont fait connaître leur goût pour les aventures, leurs haines implacables, leurs vengeances affreuses, leur mépris pour l’industrie et les arts, et leur soif du pillage. L’esprit de clan n’a plus eu de mystère pour nous ; nous avons compris ces mœurs patriarcales et féroces, ces haines et ces amitiés de famille transportées a la tribu tout entière, cette obéissance au seigneur considéré comme père, ce dévouement sans bornes pour tout ce qui le touchait, dévouement qui faisait partager à chacun des membres de la tribu ses inimitiés ou ses affections, et qui, les précipitant à la suite de quelques chefs résolus, les engageait dans une lutte désespérée contre toutes les forces de l’Angleterre. Ce dévouement au chef s’étendait jusqu’au prince qu’il servait. Les Stuarts n’eurent pas de partisans plus dévoués que les membres des clans à demi sauvages des Highlands. « Ils ont ravagé mon pays, dévasté mon champ, massacré mon