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DE LA PUISSANCE ANGLAISE DANS L’INDE ET EN CHINE.

sans secousses aux souverains indigènes. Quel que soit le parti que le gouvernement suprême juge à propos d’adopter à l’égard du Pandjâb dans les circonstances actuelles, on peut se faire une idée exacte des rapports qui existent entre les deux états, par le résultat suivant de l’enquête parlementaire commencée l’année dernière, sur la situation actuelle et les ressources commerciales de l’Inde anglaise. Nous trouverons, page 78 et suivantes, du rapport fait à la chambre des communes, le 21 juillet 1840 (interrogatoire de M. Trevelyan, ancien sous-secrétaire d’état au département des affaires étrangères dans l’Inde), les passages que voici :


Question 1438. — Quand vous avez quitté l’Inde, notre influence dans le royaume d’Aoudh était-elle précisément la même que celle dont nous jouissons maintenant dans l’Afghanistan et le Pandjâb ?

Réponse. — Oui, généralement la même ; peut-être moindre alors dans le Pandjâb qu’à Lacknow ; cette influence varie avec le cours des évènemens politiques.

Question 1444. — La position du royaume d’Aoudh et celle du Pandjâb, à l’égard du gouvernement de l’Inde, sont-elles les mêmes politiquement parlant ?

Réponse. — Non. Nominalement les positions sont très différentes, mais en réalité le souverain du Pandjâb est tout aussi bien soumis à notre influence que le roi d’Aoudh.

Question 1451 — Cette circonstance (le traité qui existe entre la compagnie et le roi d’Aoudh et qui diffère de celui conclu avec le Pandjâb) ne constitue-t-elle pas, selon vous, une grande différence dans nos relations avec ces deux pays ?

Réponse. — Non, et ceci me force à entrer dans quelques détails. La classe influente dans le Pandjâb est celle des sikhs, mais ils sont en minorité ; outre la population ordinaire, il existe une population mahométane puissante et nombreuse. La domination de Randjît-Singh était entièrement nouvelle, formée par lui-même et maintenue par la seule puissance de ses grands talens personnels. La première occasion qu’il eut de nous connaître fut lorsque lord Lake chassa Holkar à travers le Pandjâb ; la seconde, lorsque sir Charles Metcalfe, alors un très jeune homme, fut envoyé pour former un traité d’alliance avec lui contre les Français. La grande fête mahométane du ramadân eut lieu pendant son séjour à Lahore ; il n’avait pour escorte qu’une seule compagnie dans laquelle se trouvaient quelques soldats mahométans, qui, selon l’usage, firent un tazia, ou image de la tombe de Hussein à Karbalâ, qu’ils promenèrent en procession. Ceci irrita les sikhs, et quelques milliers d’entre eux se précipitèrent pour nous écraser ; mais notre petite bande se forma en carré, et, après un feu roulant qui dura quelque temps, finit par les mettre en fuite. Randjît-Singh vint féliciter les vainqueurs sur leurs succès, et