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soit en France soit en Angleterre, d’interrompre sérieusement et pour long-temps les communications de l’armée d’Afghanistan avec l’Hindoustan. Kélat, tombé pour quelques jours au pouvoir du jeune fils de Mehrâb-Khan, est occupé de nouveau par les Anglais, depuis le 3 novembre dernier. Le 1er  décembre, le jeune khan, Nasser, à la tête d’un corps considérable composé en grande partie de Brahoïs, l’une des plus redoutables tribus du Béloutchistan, attaqué par un corps anglo-indien fort de neuf cents baïonnettes, soixante chevaux et deux pièces de canon, a été mis dans une déroute complète. Nasser-Khan prit la fuite au commencement de l’action ; quatre des principaux chefs et cinq cents hommes de ses troupes restèrent morts sur le champ de bataille. Le général brahoïs, Mîr Bohar, est au nombre des prisonniers. Les opérations militaires destinées à soumettre définitivement quelques tribus à demi barbares du voisinage, ou les petits chefs rebelles sur divers points de l’Afghanistan, continuent jusqu’à présent avec un plein succès[1], et on s’attend d’un jour à l’autre à ce que le jeune khan fugitif viendra se mettre à la merci du gouvernement anglais.

Quant au Sindh, la tranquillité de cette province n’a jamais été sérieusement troublée, et d’ailleurs elle est placée, politiquement parlant, et par sa position géographique, dans la dépendance immédiate de la présidence de Bombay[2]. Tout fait donc présumer que Shâh-Shoudjâ va pouvoir régner paisiblement sur l’Afghanistan, car la soumission complète du Kohéstan est moins que jamais douteuse depuis que Dost-Mohammed s’est rendu sans condition.

Autant que l’Afghanistan, et plus que le Napâl, le Pandjâb, depuis la mort de Randjît-Singh, et celles toutes récentes de son fils et de son petit-fils, appelle l’attention et la surveillance incessantes du gouvernement suprême. Karrak-Singh et No-Nahâl-Singh, son fils, ont succombé presqu’en même temps, victimes, assure-t-on, d’un empoisonnement. Le prince Shère-Singh, que Randjît n’avait jamais voulu reconnaître pour un de ses fils, mais auquel il avait cependant

  1. Dans une des affaires partielles qui ont eu lieu avec les Béloutchis, ceux-ci, fuyant devant les troupes anglaises, ont égorgé le malheureux lieutenant Loveday, tombé au pouvoir du jeune khan, lorsque le chef nommé par les Anglais pour gouverner cette province lui avait abandonné la ville de Kélat et le Masnad.
  2. Nous devons saisir l’occasion qui se présente ici de rectifier quelques détails que nous avions donnés l’année dernière sur la famille des Talpourîs, qui règne dans le Sindh. Nûr-Mourad-Aly est mort depuis plusieurs années ; son successeur, Mir-Nour-Mobammed, vient de mourir. Le frère de celui-ci, Mir-Nasser-Khan, occupera probablement après lui le Masnad ; mais les autres chefs de la famille élevaient aussi des prétentions, dont le gouvernement anglais sera l’arbitre.