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DE LA PUISSANCE ANGLAISE DANS L’INDE ET EN CHINE.

trois mille cinq cents fantassins et de cinq cents chevaux, et le 2 novembre il engage une dernière lutte avec les troupes anglaises à un endroit nommé Parwar ou Parwân, à égale distance à peu près de Bamiân et de Kaboul. Dans ce combat, le 2ème régiment de cavalerie légère anglo-indienne, chargé par le Dost en personne à la tête de deux cents cavaliers d’élite, est ramené avec une perte considérable ; une terreur panique s’empare des sawars[1], qui abandonnent leurs officiers à l’attaque furieuse de Dost-Mohammed. Le docteur Lord, agent politique dans le nord-ouest, et plusieurs officiers, sont tués dans cette charge meurtrière. Cependant cet effort désespéré de l’ennemi ne pouvait le sauver ; l’amîr est forcé de battre précipitamment en retraite devant l’infanterie et l’artillerie, dont les manœuvres savantes et le feu terrible ont en un instant réparé l’échec éprouvé par l’avant-garde anglaise. Dost-Mohammed, voyant ses dernières espérances anéanties, disparaît après l’action, galope droit à Kaboul accompagné d’un seul cavalier, se présente inopinément le 3 novembre au soir à sir William Macnaghten, se nomme, et, trop fier pour rendre hommage à un souverain dont il a porté quinze ans la couronne, remet son sabre au représentant de la puissance anglaise dans l’Afghanistan, et se déclare son prisonnier. Sir William, surpris et touché de cette démarche chevaleresque et de la noble confiance qu’elle indique, rend à l’amîr son sabre, fait dresser une tente pour lui près de la résidence, et le traite avec toutes sortes d’égards. Ainsi finit la carrière politique de Dost-Mohammed. Ce prince, devenu à son tour l’objet de l’admiration et de la sympathie tardive des Anglais, atteint en ce moment, avec toute sa famille, et sous une nombreuse escorte, le lieu qui lui a été assigné pour résidence dans l’intérieur de l’Hindoustan.

Dans le Béloutchistan les armes de la compagnie avaient éprouvé quelques échecs assez sérieux, qu’il fallait attribuer à une confiance prématurée de la part des Anglais dans la terreur de leurs armes et dans la soumission apparente des anciens vassaux de la couronne de Kaboul. Les Anglais n’avaient pas pourvu avec leur prudence ordinaire, ou n’avaient pourvu qu’imparfaitement à l’occupation militaire des points principaux du pays. Ces échecs sont aujourd’hui réparés ; ils ont été, au reste, considérablement exagérés par les journaux, et n’ont jamais eu pour résultat, ainsi qu’on l’a imprimé et réimprimé,

  1. Cavalerie indigène. À la suite d’une enquête sur la conduite de ces troupes, le numéro du régime a été effacé des cadres de l’armée anglo-indienne.