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L’escadre rallia les bâtimens en rade de Chusan, le 28 septembre. Le capitaine Elliot se rendit le 2 octobre, sur le steamer l’Atalante, à l’embouchure de la rivière de Ning-po, et eut à terre, dit-on, une entrevue avec le ministre de la guerre E, arrivé de Péking depuis quelques jours[1]. On ne savait pas précisément ce qui s’était passé à cette conférence ; mais il semblerait que le gouvernement chinois se serait refusé à rendre immédiatement quelques prisonniers que le naufrage du transport armé le Kite et d’autres circonstances accidentelles avaient fait tomber en son pouvoir. Parmi ces prisonniers se trouvaient le capitaine Anstruther, enlevé de Chusan pendant qu’il était occupé, à peu de distance de la ville, à la levée d’un plan, et transporté à Ning-po, et le lieutenant Douglas, de la marine royale, l’un des naufragés du Kite. Les prisonniers, au reste, paraissent avoir été traités avec toutes sortes d’égards, et on s’attendait à ce qu’ils fussent envoyés à Canton et rendus à leurs compatriotes aussitôt l’ouverture des conférences entre les plénipotentiaires.

Cependant la division anglaise de blocus devant Canton avait détruit, le 19 août, après une action plus sérieuse que l’affaire de Chusan, les lignes fortifiées établies par les Chinois sur le petit col qui joint la presqu’île de Macao au continent. On avait répandu le bruit que cet acte d’hostilité avait été suivi de l’attaque et de la destruction des forts situés à l’entrée de la rivière de Canton ; mais, à dater de cette époque, toutes démonstrations hostiles de part et d’autre avaient cessé. L’amiral Elliot et le surintendant, après avoir conclu une trêve avec le gouverneur de la province de Tchi-kiang (dont les îles Chusan font partie), avaient fait voile pour Canton avec le Melville, le Wellesley, le Blenheim et la Modeste, laissant à Chusan une forte division pour la protection de cet établissement. Ils étaient arrivés le 20 novembre à Toun-kou-bay, et le 21 le steamer Queen s’avança, avec le surintendant Elliot, à l’entrée du Bogue (Bocca Tigris), et envoya un canot avec pavillon parlementaire pour communiquer avec les autorités chinoises. Les batteries chinoises firent feu sur cette embarcation ; le steamer riposta, et l’amiral se rapprocha de l’entrée de la rivière avec toute son escadre et des troupes de débarquement prêtes à agir contre les forts du Bogue, si les Chinois ne faisaient pas d’amples excuses. Ces excuses ne se firent pas attendre. « Toute cette affaire, dirent et écrivirent les mandarins était le résultat d’une méprise. Les ordres les plus stricts avaient

  1. E ou I. Il faut convenir que jamais homme, et surtout grand dignitaire n’a porté un nom plus bref. Le nom du surintendant des finances de Henri III (M. d’O) est le seul qui, pour la concision monosyllabique, puisse lui être comparé.