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DE LA PUISSANCE ANGLAISE DANS L’INDE ET EN CHINE.

par l’Inde anglaise s’élevaient à 6,666 Européens et 2,175 cypahis ou lascars (plus 1,080 non combattans). Il était venu d’Angleterre environ 5,000 hommes, soldats et matelots, en sorte que le personnel atteignait à peu près le chiffre de 15,000 hommes de toutes armes et non combattans. Les plans du gouvernement avaient été tenus aussi secrets que possible. Cependant on s’attendait généralement à un strict blocus de la rivière de Canton, peut-être à la destruction des ports à l’entrée de la rivière, au blocus de quelques autres ports dans l’est, et à l’occupation d’une portion du territoire chinois ; on supposait assez communément que ce serait un des principaux points de l’île Formose. On avait aussi parlé de la plus grande des îles du groupe de Chusan comme du but préliminaire de l’expédition ; l’évènement justifia cette dernière conjecture.

Les premiers bâtimens de la flotte anglaise arrivaient à la bouche du Tigre au moment où les Chinois essayaient vainement, pour la troisième fois, d’incendier, à l’aide d’une flottille de brûlots, les navires marchands en rade de Capsingmoun. Le blocus de la rivière de Canton fut officiellement proclamé par le commodore Bremer, le 22 juin, pour prendre effet à dater du 28. Le commodore laissa, pour former le blocus, cinq des bâtimens de sa division, et remit à la voile le 25. Le 28, l’amiral Elliot, arrivant à son tour, prit le surintendant Elliot à son bord et fit voile vers le nord pour rallier sa division d’avant-garde. Elle était concentrée le 2 juillet près de l’île du Buffle (Buffalo island), située au sud de l’archipel de Chusan, et où le général Oglander, commandant les troupes de l’expédition, mort de la dyssenterie dans les derniers jours de juin, fut enterré. Le brigadier Burrel le remplaça dans le commandement. Enfin la flotte se dirigea sur la grande île de Chusan, et jeta l’ancre, le 4, dans la rade Ting-haé-hîin, sous les murs de la ville de ce nom, chef-lieu de l’île et de tout le groupe. Le gouverneur, sommé de se rendre, et tout en alléguant l’impossibilité d’opposer aucune résistance sérieuse aux forces anglaises, vint à bord du commodore exposer lui-même la nécessité où il se trouvait, pour sauver l’honneur des armes chinoises et le sien, comme aussi pour sauver sa tête, de ne point livrer la place sans coup férir. On lui donna jusqu’au lendemain à la pointe du jour pour réfléchir, en le pressant de se rendre à discrétion et de ne pas obliger les vaisseaux anglais à faire feu sur la ville ; mais on n’entendit plus parler de lui, et le lendemain, 5 juillet, les troupes anglaises débarquèrent sous la protection du feu des vaisseaux. Les Chinois soutinrent à peine quelques instans ce feu ter-