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LA
DIVINE ÉPOPÉE
PAR M. ALEXANDRE SOUMET.

Les Français n’ont pas la tête épique ! — Telle est la plainte déjà bien ancienne et bien usée qui se formule à l’apparition de chaque épopée ; c’est là une de ces assertions en manière d’axiome que nous ne discuterons pas. Toujours est-il que, si les Français n’ont pas la tête épique, cela ne les empêche cependant pas de faire des épopées. On dirait que la nation s’est piquée d’honneur et de tout temps ait essayé de combler cette lacune déshonorante dans notre littérature ; en effet, il est douloureux pour un peuple bien situé sur la carte de l’Europe d’être entièrement dénué de poème épique. — Les Grecs ont l’Iliade et l’Odyssée, les Latins l’Énéide, les Italiens la Divine Comédie, le Roland furieux, la Jérusalem délivrée ; l’Angleterre a le Paradis perdu, l’Allemagne les Niebelungen et la Messiade, le Portugal la Lusiade, l’Espagne l’Araucana, l’Inde Nal et Damayanti, la Perse le livre des Rois ; nous autres nous n’avons rien, c’est-à-dire la Henriade.

Pourtant la liste des poèmes épiques connus en France, à partir de la Franciade de Ronsard tiendrait à elle seule un volume, si l’on avait la patience d’en faire le relevé. Sous le règne de Louis XIII,