suivant les dispositions plus ou moins hostiles des montagnards, ou l’abondance de leurs récoltes. Ekaterinodar n’est qu’une colonie sur un plan plus vaste que celles que j’avais traversées depuis Stavropol. Les officiers et l’état-major des Cosaques y ont leur résidence ; toutes les affaires un peu importantes sont soumises à la décision de l’hetman, qui désigne aussi les hommes que chaque colonie doit fournir pour le service militaire.
D’Ekaterinodar jusqu’à Kopil, on suit toujours une plaine ou plutôt d’immenses steppes. Je passai le Kouban dans un bac à Kopil, et m’enfonçai au milieu des roseaux qui, couvrant les bords du Kouban, s’étendent jusqu’à Temrouk. C’était là un des points les plus périlleux de ma route ; je dus prendre une nombreuse escorte pour pouvoir continuer mon voyage sans danger. De verste en verste, des Cosaques sont placés en sentinelles sur des espèces de belvédères élevés de vingt pieds au-dessus du sol ; ils dominent ainsi le terrain qui les environne et peuvent donner l’éveil lorsqu’ils voient un ennemi se glisser dans les roseaux.
Temrouk est située à l’entrée d’une langue de terre qui se termine à Thaman, petite ville peu importante à cause de la difficulté des communications avec l’intérieur. Si les Russes, au lieu de créer des forteresses au hasard, s’occupaient d’établir des routes sûres pour les marchandises, Thaman deviendrait un entrepôt considérable pour les colonies de la ligne. À peu de distance de Thaman sont des volcans remplis d’une boue mélangée de naphte. On s’est servi dernièrement avec succès de cette boue comme asphalte. La distance de Thaman à Stavropol est de quatre cent quarante verstes.
De Thaman je me rendis à Kertsch. J’étais arrivé au terme de mon excursion dans les provinces russes du Caucase. Kertsch fait partie du gouvernement de la Crimée. Je trouvai dans cette dernière ville le général Ravieski ; il m’assura que la position des Russes en Circassie était dans les conditions les plus favorables, et que peu d’années suffiraient pour amener une pacification complète ; il ajouta : « La Circassie sera certainement pacifiée, mais la guerre religieuse du Daghestan doit nous causer de sérieux embarras. » Je lui rapportai alors l’opinion émise devant moi par le général Grabbe, juste le contraire de la sienne, et j’avouai que, du jugement porté par deux hommes si bien en position de connaître le Daghestan et la Circassie, je ne pouvais conclure que l’impossibilité pour les Russes de réussir dans leurs projets de conquête.
J’appris que, dans une assemblée de Noutakhaits, réunis par le