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tier d’accusation, le long catalogue des griefs publics, réclamant en faveur de l’Angleterre les premiers travaux, les premiers momens de la chambre. Il s’assit enfin au milieu d’un long murmure, après avoir parlé avec une clarté, une adresse et une vigueur victorieuses. Il est impossible de ne pas admirer l’à-propos, la rapidité, le succès de ce mouvement. Je ne vois point dans l’histoire moderne un seul homme qui ait mieux connu que Pym les assemblées politiques et leurs passions. S’il eût prononcé ce discours plus tôt ou plus tard, s’il eût négligé ce moment unique, s’il n’eût pas jeté en avant ces fatales pétitions, il ne gagnait point la victoire.

C’est ainsi que l’on mène à son gré ces réunions d’hommes, qui semblent instituées pour éclaircir les questions, et qui les ont souvent embrouillées ; perpétuel mystère. Que pensent-elles ? que veulent-elles ? vers quel but tendent-elles ? Elles ne le savent pas. Quiconque le devine est leur maître, ou plutôt semble leur maître. Il y a en elles des volontés vagues, des instincts indéterminés, des nuages d’idées et de désirs incomplets, qu’il s’agit de comprendre, de fixer et de saisir. Parvenu à cette divination, vous les poussez, et elles marchent. Mais il faut frapper à l’heure, il ne faut pas se tromper sur le moment, sur le désir, sur son intensité, sur sa vivacité, sur sa profondeur ; il faut calculer le degré de lâcheté, le degré de faiblesse, le degré de courage de chacun et de tous. Pym et Danton possédaient ce talent à un degré supérieur. Grands artistes politiques, habiles à jouer de cet instrument rempli de passions et de violences, ils lui arrachèrent tous les accords qu’il leur plut d’en tirer. Après un discours qui occupa toute une journée, Pym reprit sa place, et, regardant autour de lui, il vit que ses paroles avaient inspiré à toute la chambre une détermination profonde et invincible. Sa cause était gagnée, mais ce n’était pas tout. Il fallait encore affaiblir ou détruire l’autorité de la chambre des pairs, afin de transporter dans les communes toute la force parlementaire. Un vote des pairs venait de décider que l’on s’occuperait des subsides avant de s’occuper des griefs. Pym se rend lui-même à la chambre des pairs, et lit à leur barre une adresse de la chambre des communes, accusant la chambre haute de violation de privilége, et lui refusant son concours si elle persiste. « Milords, dit Pym, vos seigneuries se sont mêlées de fixer l’époque et la place des débats relatifs aux subsides, avant que les communes vous eussent demandé votre avis à cet égard. Il faut réparer ce grief, et les communes ont l’honneur de vous prier de chercher dans votre propre sagesse quelque espèce de réparation et un moyen de prévenir le retour d’un acte pareil. Les