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DE L’INFLUENCE FRANÇAISE EN ITALIE.

la volonté de l’Autriche, le chef d’une religion de pardon et de charité aurait consenti à se montrer plus rancunier que le fils de l’empereur François ? Non ; les intentions des Autrichiens sont manifestes ; ils veulent paraître plus clémens que tous les autres gouvernemens de l’Italie, qui ont bien tort de pousser jusque-là leur déférence.

Tout ce qui éloigne les Italiens de la France les ramène nécessairement vers l’Autriche, qui profite de cet éloignement. Où trouveront-ils un autre appui ? L’Angleterre est trop égoïste et elle est l’alliée naturelle de l’Autriche ; d’ailleurs, elle convoite peut-être la Sicile, et n’est probablement pas empressée de contribuer à la régénération d’un pays qui, comme Napoléon l’a remarqué, pourrait, par sa position, par l’étendue de ses côtes et par les dispositions naturelles des habitans, se rendre maître du commerce de la Méditerranée. L’Espagne, absorbée dans ses querelles intérieures et dépourvue de marine, ne saurait coopérer directement à l’affranchissement de l’Italie. La Russie, si éloignée, n’aime guère les peuples qui désirent l’indépendance, et nous ne sommes plus au temps où, comme on l’assure, elle cherchait à exciter secrètement des princes italiens contre l’Autriche. Reste donc la France, la France qui seule peut préparer la délivrance de l’Italie si elle adopte la politique de patronage et renonce aux conquêtes Mais, pour que l’attention de la France soit attirée sérieusement de ce côté, il ne faut pas seulement qu’elle y trouve son intérêt, il faut aussi qu’elle voie dans les Italiens des hommes dignes de conquérir leur indépendance et capables de la conserver ; il faut qu’elle leur reconnaisse les qualités des peuples qui méritent la liberté, qu’elle leur voie supporter le joug non-seulement avec impatience, mais aussi avec tristesse. Quand les étrangers reprochent aux Italiens des défauts qui sont inséparables de la nature humaine, ils ont tort ; mais comment ne s’étonneraient-ils pas de cette soif de plaisirs, de cette inoccupation générale qu’ils remarquent si souvent en Italie ? Ce qu’on demanderait surtout aux Italiens, c’est la gravité, la sévérité de mœurs qui sied si bien à tout le monde, et qui va à merveille aux hommes qui ont besoin de se préparer aux grandes luttes de l’ame et du corps. Les personnes qui connaissent le mieux l’Italie s’accordent à dire, il est vrai, que depuis quelques années, sous ce rapport, il y a amélioration au moins dans certaines provinces. Si le fait est vrai, on ne saurait assez s’en réjouir. Pour que l’Italie reprenne son rang parmi les nations, il faudra ou qu’un sentiment très vif s’empare des masses, ce qui n’est guère probable aujourd’hui, ou bien que l’homme y