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LA HOLLANDE.

à des milliers d’années se passent comme un jour ; d’autres milliers d’années leur succèdent pleines de repos et de félicité.

« — Seigneur, que de prodiges vous m’offrez ! Hâtons-nous donc, ô mon roi, d’arriver à la demeure de votre père. — Restez pure et sincère, je vous donnerai mon royaume, et vous y vivrez éternellement.

« Ils continuèrent leur route à travers les champs et les prés, et ils arrivèrent auprès d’un couvent où Jésus voulait entrer. — Hélas ! voulez-vous donc me quitter ? Si je n’entends plus votre douce voix, je languirai sans cesse.

« — Attendez-moi ici, dit-il avec grace et bonté ; il faut que j’entre dans cette maison. — Il entre, et elle reste à la porte pour l’attendre ; mais, quand elle ne le voit plus, des larmes d’amour tombent sur ses joues.

« Le jour se passe, le soir arrive, elle attend encore ; mais son fiancé ne vient pas. Alors elle s’avance vers le couvent, et frappe, et crie : Ouvrez-moi la porte, mon bien-aimé est ici.

« Le portier ouvre, et regarde cette jeune fille si belle et si imposante. — Que voulez-vous ? dit-il. Pourquoi venez-vous ici toute seule ? Pourquoi ces larmes ? Dites-moi, quel chagrin avez-vous ?

« — Hélas ! celui que j’aime si tendrement m’a quittée. Il est entré dans cette maison, et je l’ai attendu long-temps. Pressez-le de sortir. Dites-lui de venir me trouver avant que mon cœur se brise, car il est mon fiancé.

« — Jeune fille, celui qui vous a quittée n’est pas venu ici ; j’ignore qui est votre bien-aimé, je ne l’ai pas vu. — Mon père, pourquoi voulez-vous me le cacher ? mon bien-aimé est ici. En me quittant, il m’a dit : J’entre dans cette maison.

« — Mais dites-moi comment il s’appelle, je vous dirai si je le connais. — Hélas ! je ne puis le dire, j’ai oublié son nom. Mais c’est le fils d’un roi ; son empire est large et profond. Son vêtement est bleu de ciel et parsemé d’étoiles d’or.

« Son visage est blanc et rose, ses cheveux sont blonds comme l’or, et toute sa nature est si merveilleuse et si douce, que rien au monde ne lui ressemble. Il venait du royaume de son père. Il voulait m’emmener avec lui ; mais, hélas ! il est parti.

« Son père tient le sceptre de la terre et du ciel ; sa mère est une vierge très belle et très chaste. — Ah. ! s’écria le portier, c’est Jésus, notre Seigneur ! — Oui, mon père ; c’est lui que j’aime et que je cherche.

« — Bien, jeune fille ; si c’est là votre fiancé, je veux vous le montrer. Venez, venez ; vous êtes au bout de votre voyage. Entrez sous notre toit, ô jeune fiancée ! et dites-moi, d’où venez-vous ? Sans doute d’une terre étrangère ?

« — Je suis la fille d’un roi ; j’ai été élevée dans les grandeurs, et j’ai tout quitté pour celui que j’aime. — Vous retrouverez plus que vous n’avez quitté près de celui d’où les biens proviennent, près de Jésus, votre amour.

« Entrez donc et suivez mon conseil. Je vous mènerai à Jésus ; mais renoncez à toutes les grandeurs païennes ; renoncez à la tendresse de votre père, oubliez votre pays de paganisme, car désormais vous devez être chrétienne.

« — Oui, mon père, je me rends à vos avis. Mon amour est ce que j’ai de plus cher, et nul sacrifice ne peut m’effrayer. — Et alors le religieux lui