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UN HIVER AU MIDI DE L’EUROPE.

mon article de dictionnaire géographique ; et, pour ne pas me départir de mon rôle de voyageur, je commence par déclarer qu’il est incontestablement supérieur à tous ceux qui le précèdent.

Majorque, que M. Laurens appelle Balearis Major comme les Romains, que le roi des historiens majorquins, le docteur Juan Dameto dit avoir été plus anciennement appelée Clumba ou Columba, se nomme réellement aujourd’hui par corruption Mallorca, et la capitale ne s’est jamais appelée Majorque, comme il a plu à plusieurs de nos géographes de l’établir, mais Palma. Cette île est la plus grande et la plus fertile de l’archipel baléare, vestige d’un continent dont la Méditerranée doit avoir envahi le bassin, et qui, ayant uni sans doute l’Espagne à l’Afrique, participe du climat et des productions de l’une et de l’autre. Elle est située à 25 lieues sud est de Barcelone, à 45 du point le plus voisin de la côte africaine, et je crois à 95 ou 100 de la rade de Toulon. Sa surface est de 1,234 milles carrés[1], son circuit de 143, sa plus grande extension de 54, et la moindre de 28. Sa population, qui, en l’année 1787, était de 136,000 individus, est aujourd’hui d’environ 160,000. La ville de Palma en contient 36,000, au lieu de 32,000 qu’elle comptait à cette époque. La température varie assez notablement suivant les diverses expositions. L’été est brûlant dans toute la plaine ; mais la chaîne de montagnes qui s’étend du nord-est au sud-ouest (indiquant par cette direction son identité avec les territoires de l’Afrique et de l’Espagne, dont les points les plus rapprochés affectent cette inclinaison et correspondent à ses angles les plus saillans) influe beaucoup sur la température de l’hiver. Ainsi, Miguel de Vargas rapporte qu’en rade de Palma durant le terrible hiver de 1784, le thermomètre de Réaumur se trouva une seule fois à 6 degrés au-dessus de glace dans un jour de janvier ; que d’autres jours il monta à 16, et que le plus souvent il se maintint à 11. — Or, cette température fut à peu près celle que nous eûmes dans un hiver ordinaire sur la montagne de Valdemosa, qui est réputée, il est vrai, une des plus froides régions de l’île. Dans les nuits les plus rigoureuses, et lorsque nous avions deux pouces de neige, le thermomètre n’était que de 6 à 7 degrés. À huit heures du matin, il était remonté à 9 ou 10, et à midi il s’élevait à 12 ou 14. Ordinairement, vers trois heures, c’est-à-dire après que le

  1. « Medida por el ayre. Cada milla de mil pasos geometricos y un paso de 5 pies geometricos. » (Miguel de Vargas, Descripciones de las islas Pitiusas y Baleares. Madrid, 1787.)