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vaise que quelques personnes paraissaient le craindre. En dernier résultat, l’équilibre pourra se rétablir dans notre budget au moyen d’un emprunt de 4 à 500 millions, emprunt qui n’est pas urgent et dont les produits seront consolidés sur notre sol par des travaux publics qui augmenteront notre puissance productive et la richesse nationale. Au fait, on ne demande à l’avenir que de payer une faible partie de l’immense accroissement de capital qu’on lui laisse.

Si la guerre devait éclater, nous entrerions dans une voie exceptionnelle à laquelle toute nation jalouse de sa dignité et de sa véritable grandeur doit savoir se résigner, lorsque le devoir et l’intérêt de l’état le lui commandent. Sans doute, nos finances, comme celles de tout pays qui supporte les énormes dépenses d’une guerre, éprouveraient alors quelque gêne. Nous devrions détourner des travaux publics et d’autres voies d’améliorations les sommes qui y sont maintenant consacrées ; nous devrions probablement grever l’avenir de charges plus considérables, tout en lui laissant un moindre capital. C’est le cas d’une famille laborieuse qu’une maladie vient de frapper ou qui se trouve impliquée dans un procès fort coûteux. Elle ne pourra pas faire face aux nouvelles dépenses avec son revenu ; elle le pourra encore moins si elle ne diminue pas ses dépenses ordinaires. Il y aurait sans doute folie à se donner la maladie pour le plaisir de l’avoir ; il y aurait folie à ne pas éviter un procès si l’honneur n’est pas engagé, s’il ne s’agit pas d’un de ces intérêts majeurs où l’on ne peut rien concéder, enfin si une transaction équitable et honorable est encore possible. Mais si la maladie nous atteint, si le procès est inévitable, à quoi bon les plaintes, les lamentations ? Il faut, avant tout, conserver sa vie, défendre son droit, maintenir son honneur.

Si la paix, ainsi que le pense M. Humann, est maintenue, nos petits embarras financiers ne tarderont pas à disparaître, même en ajoutant une centaine de millions par an à nos dépenses militaires. D’un côté, la prospérité publique augmentera naturellement d’année en année le produit des impôts actuels ; de l’autre, sans introduire un impôt nouveau, on pourra facilement, par quelques dispositions nouvelles, obtenir des impôts existans un revenu plus considérable.

M. Humann se propose de rendre au produit du timbre tout ce que la violation des lois et la fraude lui enlèvent. Nous ne pourrons qu’applaudir à cette mesure ; la morale, la justice, comme l’intérêt du trésor, nous le commandent. Ainsi que tous les autres impôts, celui du timbre doit être, conformément aux prescriptions des lois, payé par tous. Comment souffrir que, tandis que le timbre est une charge lourde et inévitable pour les uns, pour les plaideurs, les journalistes, pour ceux qui ont besoin d’actes authentiques, d’actes privés enregistrés, il puisse être impunément évité par un grand nombre de contribuables, par des hommes qui pourraient le payer beaucoup plus facilement que la plus grande partie de ceux qui le supportent effectivement ? On a beau se dissimuler la nature morale des faits, elle n’est pas