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gistrats pleins de sagesse et de prudence, les guerriers ardens et magnanimes, dociles pour leurs chefs, doux pour leurs concitoyens, terribles pour les ennemis, et enfin la classe des artisans et des laboureurs, dépourvue à la fois de raison et de courage, cette classe, entièrement sacrifiée dans sa politique, à laquelle il trace des devoirs sans lui accorder de droits, et qu’il ne semble conserver dans l’état que pour éviter à l’homme libre la nécessité de se servir lui-même. Il faut voir dans le Timée comment il assigne à chaque partie de l’ame la place qu’elle doit occuper dans le corps ; l’ame divine, l’esprit, la raison habite la tête, comme le lieu le plus élevé, et par conséquent le plus noble ; puis les dieux qui ont formé notre corps, craignant de souiller l’ame divine par le contact de la partie mortelle de nous-mêmes, construisirent entre la tête et la poitrine une sorte d’isthme et d’intermédiaire, c’est le cou. La partie virile et courageuse de l’ame, sa partie belliqueuse fut placée dans la poitrine ; et comme on sépare l’habitation des hommes de celle des femmes, le diaphragme fut placé comme une cloison entre le séjour du courage et celui des passions désordonnées. Pour cette dernière partie de l’ame, qui demande des alimens et des breuvages, et tout ce que la nature de notre corps nous rend nécessaire, les dieux l’ont étendue dans cette région qui sépare le diaphragme et le nombril. Ils l’y ont attachée comme une bête féroce, afin que, sans cesse occupée à se nourrir à ce râtelier, et aussi éloignée que cela se pouvait du siége du gouvernement, elle causât le moins de trouble, fit le moins de bruit possible, et laissât le maître délibérer en paix sur les intérêts communs. Aristote, comme on sait, mettait l’ame dans le cœur et non dans tête ; mais on en revint plus tard au sentiment de Platon, et Descartes, plus habile que ses devanciers, savait précisément dans quelle glande du cerveau était situé le siége de l’ame. La théorie de la douleur et du plaisir, dans le Philèbe et la République, théorie exposée d’ailleurs par M. Cousin avec une clarté et une précision bien rares dans l’argument philosophique qu’il a mis en tête du Philèbe ; la réfutation contenue dans le Théétète, de la doctrine sensualiste professée par Protagoras ; les nombreux détails exposés dans le Timée sur les impressions que nous devons à nos différens organes, tout cela forme une science de l’homme déjà assez étendue, et pour ne rien dire ici des explications souvent bizarres et quelquefois remarquables dans lesquelles entre Platon sur la nature physiologique de l’homme, je me bornerai à rappeler que Galien a commenté la physique de Platon, et que Goethe, le grand poète, dans sa Théorie des