Page:Revue des Deux Mondes - 1840 - tome 24.djvu/689

Cette page a été validée par deux contributeurs.



UNE VISITE
AU ROI GUILLAUME.

Dans une des plus belles et des plus longues rues de La Haye, à gauche en allant vers les dunes mélancoliques de Scheveningen, on aperçoit une maison bien moins large et moins splendide que celles des banquiers d’Amsterdam, une maison à un seul étage, construite au fond d’une cour assez étroite, touchant par deux petites ailes parallèles à l’alignement de la rue, et gardée par deux factionnaires. C’était naguère encore la demeure d’un roi qui a régné pendant quinze ans sur de riches provinces et de vastes colonies, et qui, après avoir perdu par une révolution subite la moitié de ses états, vient d’abdiquer volontairement la couronne qui lui restait et se retire dans la vie privée. Tous les mercredis, vers onze heures, on pouvait voir devant la royale habitation de la Veenstraat un singulier spectacle. Des hommes à pied et en voiture, en habit brodé et en veste de matelot, arrivaient à la porte du palais, traversaient pêle-mêle les cours, et s’avançaient vers les appartemens du roi. Tous les mercredis, Guillaume Ier donnait audience à ses sujets. On entrait, on inscrivait son nom sur une feuille de papier, et l’on était admis à tour de rôle devant le roi. Un aide-de-camp, tenant la liste en main,